À l’heure où tous les projecteurs sont braqués sur l’intelligence artificielle, où la capitalisation de Nvidia a dépassé les 5 000 milliards de dollars, intéressons-nous à d’autres sociétés de la cote. Et dont la croissance actuelle est supérieure à celle des superstars américaines.
Le laboratoire pharmaceutique Eli Lilly vient de publier ses résultats pour le 3ème trimestre
Le moins que l’on puisse dire est qu’ils sont époustouflants. Les revenus ont crû de 54 % sur un an, à 17,6 milliards de dollars. Le résultat opérationnel (en normes comptables US GAAP) est passé de 1,5 à 7,36 milliards de dollars.
Si l’on exclut les charges exceptionnelles pour acquisitions au cours des deux exercices, la progression de ce dernier ressort à 121 % ! C’est d’autant plus remarquable que les médicaments vedettes de la firme d’Indianapolis (les fameuses molécules dites GLP-1 contre le diabète et l’obésité) font l’objet de pressions énormes de la part des politiques. Et, plus particulièrement de l’administration américaine.
Quelle est la recette de ce succès dans un environnement de baisse des prix ?
Diabète et obésité : des marchés en forte croissance
C’est un fait : le marché du diabète et celui de l’obésité sont malheureusement voués à croître fortement. Notamment du fait d’une augmentation importante de la prévalence. Ainsi, selon la Fédération internationale du diabète, 11 % de la population mondiale adulte (de 20 à 79 ans) était diabétique en 2024. Ce qui représente 589 millions d’individus.
Ce chiffre passera à 853 millions en 2040. Essentiellement en raison du vieillissement, de l’urbanisation et du manque d’activité physique. En ce qui concerne l’obésité, les données sont encore plus alarmantes. En effet, plus d’un milliard d’êtres humains devraient être concernés par cette pathologie dans un avenir encore plus proche (2030).
La Fédération mondiale contre l’obésité ne peut que constater son impuissance face à ce phénomène inéluctable. Et ce, en dépit de tous les efforts entrepris pour inverser cette tendance.
Une forte hausse des volumes de médicaments vendus
C’est une réalité pour Eli Lilly : les volumes de tous ses médicaments vendus dans le monde sont en forte progression (+ 62 %). La tendance est générale : +60 % aux États-Unis, +98 % en Europe, +24 % au Japon et +21 % en Chine. Cela contraint le groupe pharmaceutique à investir cette année 5,3 milliards de dollars dans ses capacités de production, afin de répondre à cette incroyable demande.
Une forte baisse des prix aux USA et une hausse des prix en Europe
Prenons-en bien conscience. Les Européens devront payer plus cher les médicaments innovants ces prochaines années. Ce qui pèsera sur nos systèmes de santé.
Donald Trump a signé le 12 mai dernier un décret (executive order) intitulé « Offrir un prix des médicaments sur ordonnance aux patients américains sur la base de la nation la plus favorisée ».
Le but étant d’aligner le prix des traitements à celui le plus faible pratiqué dans les pays de l’OCDE. Cette contrainte avait initialement fortement inquiété les investisseurs, qui redoutaient - à tort, car illégal - une baisse des prix généralisée.
L’accord individuel du 30 septembre signé entre la Maison Blanche et Pfizer a démontré que cette nouvelle politique concernerait uniquement les nouveaux médicaments et non les anciens. Le point crucial est que Pfizer garde la main et est donc libre de fixer lui-même le tarif unique facturé aux patients du monde entier. Le but étant d’assurer une profitabilité suffisante pour rémunérer l’innovation. Cette uniformisation se traduit forcément par un rabais en Amérique du Nord (prix le plus élevé) et une remontée ailleurs (prix les plus faibles).
Bien qu’Eli Lilly n’ait pas encore signé un tel accord, le laboratoire commence à s’aligner sur cette politique. En effet, sur un an, la baisse sur l’ensemble de ses produits a été de 15 % aux États-Unis. Contre une augmentation de 6 % en Europe.
Eli Lilly : des gains de part de marché face à Novo Nordisk
Dans ce duopole partagé actuellement avec Novo Nordisk, l’avantage est clairement à l’Américain. En effet, sa part de marché sur le segment de l’incrétine (hormone présente dans l’estomac dont sont issues les molécules GLP-1 en version analogique) ne cesse de grimper. Elle affiche désormais 57,9 % contre 41,7 % pour le Danois.
À l’avenir, un marché en forte croissance qui sera plus fragmenté
De nombreux entrants vont arriver et donc la compétition sera plus rude. Cependant, le gâteau sera beaucoup plus gros ces prochaines années. Et les nouveaux acteurs visent plutôt des segments de niche, pour des patients non satisfaits par les traitements de référence actuels. Notons qu’Eli Lilly reste bien positionné dans la course avec son portefeuille de produits en phase de recherche.
Son traitement oral contre l’obésité (Orforglipron) reste bien positionné. En effet, il est économiquement facile à fabriquer et sans contrainte de régime alimentaire. Tous ces éléments renforcent nos convictions sur l’avenir de ce laboratoire américain.
Les chiffres de la semaine
- 54 %. La croissance des revenus d’Eli Lilly au 3ème trimestre.
- 7,36 milliards de dollars. Le résultat net d’Eli Lilly au 3ème trimestre contre 1,5 en 2024.
- 5 031 milliards de dollars. La capitalisation boursière de Nvidia le 29 octobre.