Actions américaines : le blues du businessman

Les investisseurs sont désorientés, comme s’ils avaient perdu leur boussole. L’eldorado sur les actions américaines, promis par les stratèges les plus influents depuis la victoire de Donald Trump en novembre dernier, se transforme en véritable fiasco.

Ainsi, nous vivons la pire sous-performance du marché américain depuis 20 ans. À ce jour, la performance en euro de l’indice S&P 500 et du NASDAQ 100 est respectivement de - 10,27 % et de -12,63 %. Contre +9,15 % pour celle de l’indice Euro Stoxx 50 sur la même période.

De surcroît, tous les gains latents sur les portefeuilles américains observés depuis l’élection présidentielle du 5 novembre ont été effacés en moins d’un mois (depuis le 19 février). Et ce, du fait du double effet négatif des baisses des marchés et du dollar.

Dorénavant, les mêmes stratèges qui recommandaient d’acheter des actions américaines au détriment des actions européennes préconisent l’inverse. Alors que l’indice Euro Stoxx 50 a effacé son important retard accumulé depuis fin 2023 sur son homologue américain en euro (qui avait culminé à 25 % le 27 novembre). 

Faut-il les croire, après un tel retracement ? Quelles sont les causes de ce brutal revirement d’opinion ? Qui sont les acteurs qui ont vendu leur portefeuille ? Et ceux ayant renforcé leurs positions au cours de cette violente vague de baisse ?  

Rien ne se passe comme prévu. Une fois encore, ce fameux dicton, applicable à de nombreuses prédictions dans divers domaines, s’est matérialisé sur les marchés.

L’exception américaine, qui a prévalu en 2024 et qui devait se prolonger cette année, semble avoir vécu. Les taux longs américains, qui devaient se tendre - avec une économie florissante et une inflation orientée à la hausse - se sont, en réalité, contractés de 0,26 %.

À l’inverse, les rendements obligataires européens, qui devaient baisser grâce à la poursuite de l’assouplissement monétaire de la BCE, se sont tendus de 0,50 %. L’euro, qui devait se déprécier face au dollar, s’est en réalité renforcé contre le billet vert de presque 5 %.

Devant tant de surprises, certains investisseurs sont pris à revers et enregistrent de lourdes pertes.

Une étude de la banque JP MORGAN du 12 mars, analysant les flux et les liquidités, permet d’identifier ce qui s’est concrètement passé. Tout d’abord, le positionnement sur les États-Unis dans les portefeuilles était extrême jusqu’en février. Les investisseurs avaient quasiment tous favorisé cette zone géographique dans leur allocation, cédant aux sirènes de Donald Trump. De surcroît, l’optimisme était fort et la volatilité était faible. Ce qui a entraîné une prise de risque élevée et une importante pondération en actions dans les portefeuilles. Même au sein des fonds diversifiés.

Le retour aux commandes du président américain, si propice aux affaires et à la dérégulation, devait entraîner une hausse durable de la bourse et des cryptomonnaies. Tout s’est enrayé avec l’instauration des droits de douane élevés et des données macroéconomiques faibles. Ces éléments ont provoqué une révision baissière des prévisions de croissance du PIB outre-Atlantique.

Les fonds quantitatifs ont coupé leurs positions en février pour passer dorénavant vendeurs. Les fonds spéculatifs dits « long/short » ont tardé à réagir. Ils ont enregistré de lourdes pertes sur leurs positions à effet de levier, les contraignant à liquider leurs positions. Ce mouvement ne semble pas terminé à ce jour. Le phénomène est identique sur le change. Les positions vendeuses sur les contrats euro contre dollar ont été réduites, entraînant une forte appréciation de la devise européenne.

Après ce triste tableau, il convient de relativiser. Et ce, même si le mot récession revient en boucle dans les salles de gestion. Le marché du crédit, qui a mieux évalué le risque de contraction de l’activité ces deux dernières années, reste solide. Et les particuliers américains, même s’ils sont devenus pessimistes, continuent d’acheter des actions américaines. Les fonds souverains et de pension devraient procéder à leurs fameux recalibrages trimestriels. Le montant des achats à effectuer par ces entités est estimé à plus de 135 milliards de dollars en fin de mois.

Rien n’est donc perdu, même si le marché reste morose et l’euphorie a laissé place au pessimisme.

Nous vivons un ralentissement aux États-Unis, et non une récession, couplé à une vague de contraction des multiples de valorisation, lié au débouclement d’un excès de positions sur les  actions américaines. Ce mouvement n’est pas terminé et la volatilité se tend, ce qui est synonyme de réduction supplémentaire de positions. Il convient donc d’être patient, avant de procéder à des achats à bon compte et de ne pas désespérer en attendant.

Les nouveaux plans européens de défense et allemand d’infrastructure ont changé la donne pour l’Europe et surtout pour l’Allemagne. Les investisseurs se mettent à croire en un nouvel eldorado, pour se remettre de leur dépression, en achetant les rares valeurs cotées du secteur de la défense. Notre lettre du 21 février était optimiste pour ce segment de la cote. Dorénavant, le titre Rheinmetall se paie 45 fois les résultats 2025 contre 25 fois pour Nvidia.

Attention à ne pas commettre les mêmes erreurs dans l’autre sens, même si le vent a tourné provisoirement et que les cycles sont différents.

- 3 004 dollars.
Le nouveau record historique en séance de l’once d’or au 14 mars.

- 200 %. Les droits de douane imposés par les USA sur tous les vins et le champagne, si l’Union européenne ne retire pas les siens sur le whisky américain.