Déficit budgétaire : la cigale chantera-t-elle tout l'été ?

Ce n’est pas glorieux. La France a été encore une fois mise au coin par la Commission européenne pour déficit budgétaire excessif. Notre pays fait donc partie du club des 7 cancres (Italie, France, Belgique, Hongrie, Slovaquie, Pologne et Malte) frappés par une procédure européenne. Seul lot de consolation, le bonnet d’âne a été décerné à l’Italie, dont le solde budgétaire négatif représentait 7,4 % du PIB en 2023. 

Quelles sont les origines et les conséquences de cette procédure qui peut entraîner, d’ici un an, une lourde sanction pécuniaire ? Et ce alors que les candidats promettent davantage de dépenses pour se faire élire aux élections législatives ?

Il est très surprenant de constater que déjà dans le traité instituant la communauté européenne (TCE) signé à Rome en 1957, la notion de déficit était déjà encadrée. En effet, son article 104 stipulait :

  • - Les États membres évitent les déficits publics excessifs.
  • - La Commission surveille l'évolution de la situation budgétaire et du montant de la dette publique dans les États membres en vue de déceler les erreurs manifestes. Elle examine notamment si la discipline budgétaire a été respectée.

Aujourd’hui, la procédure de déficit excessif est incluse dans l’article 126 du traité de fonctionnement de l’UE (TFE). Cette dernière confirme son attachement aux dispositions relatives au Pacte de stabilité et de croissance.

En juin 1997, les États qui souhaitent adhérer à l’euro ont signé cet engagement. Il permet de sanctionner financièrement un pays membre de la zone euro qui s’exposerait à un déficit budgétaire supérieur à 3 % du PIB. Et dont la dette publique dépasserait 60 % du PIB. Avec l’élargissement de l’euro et la crise financière de 2008, un nouveau « pacte budgétaire » a été signé en 2012. Il a pris effet au 1er janvier 2013.

Selon son article 8, la Commission européenne peut saisir la Cour de Justice pour infliger le paiement d'une somme forfaitaire ou d'une astreinte adaptée et ne dépassant pas 0,1 % de son PIB.

Soit actuellement 3 milliards d’euros pour la France.

Ce n’est pas la première fois que l’Hexagone est concerné par une telle procédure, comme le résume une communication du Sénat en mars 1998.  Dix des douze États membres de l'époque (dont l’Allemagne) ont été concernés pour la première fois en 1994. Comme toujours depuis 30 ans, les mauvais élèves ont échappé aux sanctions. Ils ont présenté des mesures rectificatives et montré leur bonne volonté pour obtenir une abrogation des procédures.

Le problème, cette fois-ci, est qu’un nouveau gouvernement siègera en France dans moins de trois semaines. Probablement avec des dépenses supplémentaires à la clé. Quelle que soit la couleur politique, celui-ci devra jongler entre les promesses, la réalité et la bonne volonté de Bruxelles. Donc des autres États membres. 

Pour autant, les investisseurs étrangers ne semblent pas, pour le moment, s’inquiéter. Ils ne se délestent pas massivement des actifs français. Ils retiennent l’exemple de l’Italie, avec l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir. Ainsi que la nomination de Giorgia Meloni en octobre 2022, en tant que présidente du Conseil des ministres.  

Ceux qui ont vendu la dette italienne - quand l’écart de taux entre le taux souverain italien et allemand à 10 ans dépassait 2,50% - ont eu tort. Celui-ci est graduellement revenu à moins de 1,30%, avant de se tendre de nouveau à plus de 1,50%, après les élections européennes.

Selon les derniers sondages, leur raisonnement se base sur le fait qu’aucune majorité n’émergerait à l’Assemblée nationale le 7 juillet au soir. Dans ce scénario, le nouvel exécutif ne pourrait passer que des lois de finance ou autres par activation de l’article 49-3 de la Constitution. Il convient d’être prudent à ce stade et d’attendre l’issue des urnes, avant de prendre une décision pragmatique.

Pour le moment, nous avons réduit dès le 11 juin notre exposition française. En effet, nous avons allégé les valeurs financières, les valeurs de service publique, de concession et d’énergie. Ces dernière étant potentiellement exposées à des gels de prix et des hausses de taxes.  

On constate une forte augmentation des dépenses dans les programmes des favoris. Elles devront être financées par des nouvelles taxes ou des annulations de crédits versés.

L’heureux élu devra donc faire preuve de grande subtilité entre les électeurs, les députés, les marchés et la Commission européenne. Afin que la France continue à être une cigale, qui va chanter encore plus fort cet été. Malheureusement, l'hiver prochain et l'année prochaine risquent d'être très rigoureux. 

- 3 440 milliards d’euros
La capitalisation boursière de Nvidia en séance le 20 juin, devenant la première mondiale

- 73 milliards d’euros
Le record de dividendes versés au titre de 2023 par les entreprises de l’indice CAC 40