Les investisseurs détestent l’incertitude et cette année la France est championne olympique dans cette discipline. Notre nation souffre d’un mal chronique depuis 1975, appelé déficit structurel, qui la ronge lentement mais sûrement.
Le déficit structurel de la France dure depuis 1975
Certes, tout a basculé à cause du premier choc pétrolier. Mais la politique de relance keynésienne a toujours été adoptée depuis un demi-siècle. Et ce, quel que soit les cycles économiques.
Imaginez dire à un créancier : « Je vous propose une aventure extraordinaire, qui consiste à prêter à un pays merveilleux, peuplé de gens talentueux, mais toujours insatisfaits et qui ne voient pas la réalité en face. Ils vivent en autarcie philosophique, avec la conviction que leur train de vie, leur modèle social vont perdurer, malgré la conjoncture difficile et une démographie défavorable. Ils sont d’accord pour réduire leurs déficits, mais refusent individuellement de faire le moindre effort. En cette année de dérapage des comptes publics, ils vivent sans gouvernement et sans budget pour l’année prochaine, faute de cirque législatif ».
La France souffre de plusieurs maux
Pourtant rien n’est perdu, car le créancier en question tient bon et garde une certaine confiance. Parce que la France n’est pas un cas isolé et souffre de plusieurs maux cumulés, que l’on retrouve unitairement ailleurs. De plus, inconnu ne veut pas dire chaos, mais situation inédite, qui doit être gérée différemment.
Pourquoi le marché ne réagit pas plus violemment ? Que va-t-il se passer maintenant ?
Contrairement à l’annonce surprise de la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin dernier, la chute du gouvernement Barnier sans majorité législative, était une hypothèse de plus en plus probable. Et ce, au fur et à mesure que l’on avançait dans le calendrier. Un certain compte à rebours s’était enclenché avant le passage à l’Assemblée nationale des diverses propositions de loi de financement et de budget.
Déficit et contre-performance
Ainsi, l’écart de taux entre les emprunts à 10 ans français et allemand s’était tendu de 0,16% depuis trois semaines, pour atteindre le niveau de 0,88% le 2 décembre. Soit au plus haut depuis 2011.
L’indice CAC 40 (dividendes réinvestis), qui faisait jeu égal au printemps avec son homologue allemand (l’indice DAX), accumule désormais 21,31% de retard de performance cette année. Le contraste est même extrême en novembre, avec l’indice S&P 500 converti en euro, puisque l’élection incontestable de Donald Trump a fait grimper les actions américaines de 8,82% en euro, contre une baisse de 1,53% pour les actions françaises. Soit 10,35% de contre-performance.
Les investisseurs allègent les valeurs françaises
Le mal est déjà fait, car les investisseurs ont déjà allégé les valeurs françaises. L’annonce de la chute du gouvernement est un fait accompli et anticipé. Malgré l’absence de budget, la Constitution est assez bien faite pour éviter une fermeture des administrations, comme aux États-Unis, à condition que tous les décrets soient signés et que les lois spéciales soient adoptées d’ici la fin de l’année. La voie est désormais ouverte pour une reprise technique. Beaucoup de titres de grandes capitalisations dont l’activité principale est à l’étranger sont attractifs. Ce mouvement est-il durable ?
Cette motion de censure, votée par 331 membres, est inédite dans l’histoire de la Vème République depuis octobre 1962. Contrairement à aujourd’hui, l’Assemblée avait été dissoute et la victoire des gaullistes aux élections législatives de novembre avait permis au premier ministre démissionnaire de retrouver son poste. Cette fois-ci, pas de dissolution immédiate et la même assemblée, sans camp majoritaire, va pouvoir faire tomber comme elle l’entend le prochain gouvernement.
Déficit : assainir la situation
L’incertitude va donc persister. Et ce, même si tous les partis se sont engagés à prendre toutes les décisions nécessaires pour éviter un blocage des finances publiques. Pour une reprise durable et une réduction de la décote sur les actifs financiers français, il faut l’assurance qu’un pouvoir exécutif et législatif en place soit soucieux d’assainir la situation. Nos créanciers vont rester pragmatiques, tout en ne cédant pas à la panique. La France fait face à un déficit primaire (avant paiement des intérêts) proche de 3%. Celui des États-Unis se situe autour des 3,5%.
Dette publique et taux d'emprunt
Cependant grâce à l’euro, le Trésor français emprunte à 2,90% à 10 ans contre 4,20% pour le Trésor américain. Les deux pays souffrent d’une dette sur PIB qui dépasse allègrement les 100%. Cependant la dynamique des deux économies est bien différente. Avec la triple victoire de Donald Trump et ses alliés républicains, les États-Unis ont clairement fait le choix de résoudre ce problème en dopant leur PIB. Tandis que la France reste malheureusement sclérosée.
Les chiffres de la semaine
- 21,31 %
L’écart de performance en 2024 entre les indices Dax et CAC40.
- 10,35 %
L’écart de performance convertie en euro, en novembre, entre les indices S&P500 et CAC40.
- 101 375,51 $
Nouveau record historique du bitcoin le 5 décembre.