Double baisse sur les marchés de taux...

Une fois n’est pas coutume, les marchés obligataires ont connu une double baisse depuis notre dernier édito. La première passe concrètement pour une sanction, là où la seconde a été plutôt bien perçue par les investisseurs, en dépit des incertitudes qui demeurent.

Vendredi dernier, après la clôture des marchés financiers, l’agence de notation Standard & Poor's (S&P) a abaissé la note long terme souveraine française d’un cran. Cette baisse, la première depuis 2013, fait passer la note de la France de AA à AA-, en raison de la détérioration de la situation budgétaire. Elle se range ainsi à l’avis de Fitch, une autre agence de notation. Moody’s reste pour le moment plus « accommodante » à Aa2, soit un cran au-dessus.

Cette réduction reflète les doutes de S&P concernant la capacité du pays à ramener son déficit public sous le seuil de 3% du PIB d’ici la fin du quinquennat en 2027. Elle se base notamment sur son estimation de la poursuite de la hausse du niveau d’endettement dans un contexte de croissance modeste pour effectuer cette évaluation. Cela mettra donc une pression supplémentaire sur le gouvernement et pourrait compliquer l’élaboration du projet de loi de finances pour l’année 2025 prévu à l’automne.

Les marchés n’ont pas réagi à la nouvelle, qui avait été anticipée de longue date, à la suite notamment de l’avertissement donné par l’agence S&P fin 2022. L’écart de rendement entre la France et l’Allemagne est donc resté sous les 0,5%, signe qu’aucune turbulence particulière n’est à observer sur les actifs financiers.

Enfin, la France comptait émettre entre 10,5 et 12 milliards d’euros d'obligations assimilables du Trésor (OAT) hier. C’est chose faite puisqu’elle a émis au maximum de la tranche via trois émissions à 10, 15 et 30 ans. Ce placement montre bien l’engouement pour le rendement offert malgré l’intervention de l’agence de notation.

La Banque centrale européenne a décidé de baisser les taux d’intérêts de 25 points de base jeudi, à la quasi-unanimité, puisqu’un seul membre se serait opposé à cette réduction. Son taux de dépôt s’établit ainsi à 3,75%. Cela marque la fin du cycle de hausses entamé en juillet 2022 et qui s’est achevé en septembre 2023. Pour mémoire, la dernière baisse de taux de la part de la BCE remonte à septembre 2019 lorsqu’elle avait fait passer son taux de -0,40% à -0,50%.

Elle revoit à la hausse ses prévisions d’inflation à +2,5% en 2024 et +2,2% en 2025, soit une hausse de 20 pb pour chaque année. Celle pour 2026 reste inchangée, à 1,9%. Côté croissance, la révision se fait dans les deux sens avec un PIB attendu à 0,9% en 2024 et 1,4% pour 2025, soit une évolution de +30 pb et -10 pb respectivement. On reste à 1,6% pour 2026.

Christine Lagarde a mentionné qu'elle n'allait pas s'avancer sur des hypothèses quant à la progression future de la politique monétaire de l’institution. Elle s'est ainsi abstenue de fournir des indices pour les mois à venir, réitérant le fait que la banque centrale resterait dépendante des données économiques qui seront publiées. Elle a d’ailleurs souligné que les prochains mois seront à risque et pourraient voir de fortes fluctuations de ces dernières. Dans ce sens, la BCE reste prête à utiliser tous les outils à sa disposition si nécessaire.

À la suite de cette intervention, les investisseurs continuent d’anticiper uniquement une baisse de taux supplémentaire pour l’année 2024. Cette dernière devrait, toujours selon eux, avoir lieu d’ici la réunion de septembre ou bien celle d’octobre.

- 3 100 Mds€  
La dette publique de la France

- 5,5 % du PIB
Le déficit budgétaire de la France en 2023

- 25 pb
La baisse de taux de la BCE lors de sa réunion du 6 juin 2024