Fin de l'hypercroissance de Nvidia ?

La publication de Nvidia reste la plus attendue parmi celles des « Sept Magnifiques ». La société a annoncé, au deuxième trimestre, des revenus et un bénéfice net (selon les normes comptables US GAAP) en progression. Ces derniers augmentent respectivement de 56 % et de 59 %. Légèrement au-dessus des attentes. En plus de sa croissance remarquable, l’entreprise reste une formidable machine à cash. Avec une marge nette de plus de 56 % et un free cash-flow opérationnel de 15,4 milliards de dollars (soit un tiers des ventes).

Même solides, ces données ne suffisent plus à satisfaire les investisseurs les plus exigeants. Ceux-là même qui misent sur une très forte performance du titre dans les séances suivant la publication des résultats. Toutefois, arrêtons de simplement comparer les chiffres avec le consensus, pour expliquer la réaction à court terme du cours de l’action. Menons une analyse beaucoup plus approfondie, afin de répondre à cette question plus existentielle : assistons-nous à la fin de la surperformance de Nvidia en Bourse ?

Les résultats du segment centre de données (Data Center) ont légèrement déçu. La partie calcul régresse de 1 % d’un trimestre sur l’autre, en raison d’une chute des ventes de puces H20. De l'autre côté la partie réseaux progresse vivement de 46 %, portée par l’essor de NVLink et d’InfiniBand.

Deux à cinq milliards de dollars de chiffre d’affaires signés en Chine sur les fameuses puces H20, spécialement conçues pour ce pays, étaient toujours en attente de réalisation. Après une restriction totale sur ces composants jugés stratégiques, le gouvernement américain a mis en place un système de licences. Ceci, afin de mieux cibler et contrôler les clients finaux. En contrepartie, un taux de prélèvement de 15 % en faveur des États-Unis devrait être instauré. Dans ses prévisions de 54 milliards de dollars de revenus pour le troisième trimestre, la directrice financière Colette Kress a précisé qu’aucune vente en Chine n’était incluse. Le marché chinois, d’un potentiel estimé de 50 milliards de dollars, est donc capable, à lui seul, de redynamiser la croissance et les profits du groupe.

Certains analystes redoutent l’émergence d’une concurrence accrue. Ainsi, Broadcom prévoit un potentiel de croissance de plus de 50 % en 2026 dans ces puces de type ASIC dédiées à l’intelligence artificielle. En effet, elles sont réputées plus abordables et moins consommatrices d’énergie. Cette menace est-elle capable de remettre en cause la suprématie de Nvidia ?

L’entreprise a répondu à cette problématique au cours de la conférence de presse. Elle a comparé les caractéristiques des circuits intégrés à application spécifique — Application-Specific Integrated Circuit (ASIC) — et les produits de Nvidia, utilisant davantage de GPU — Graphics Processing Unit. L’intelligence artificielle est considérée comme de l’informatique accélérée. Bien plus complexe que l’informatique standard.

Plusieurs industries utilisent des circuits intégrés standardisés pour des tâches répétitives, notamment dans la téléphonie mobile et l’automobile. L’IA générative est beaucoup plus complexe et nécessite bien plus que la simple conception de logiciels intégrés dans des transistors. Seule une partie des fonctions liées à l’IA pourra être standardisée. Le reste sera pris en charge par des processeurs complexes et puissants comme ceux de Nvidia.

Voilà pourquoi l’entreprise reste confiante face aux besoins divers en solutions innovantes, qui sont en réalité complémentaires.

Pour mieux comprendre la révolution technologique en cours et son évolution, fions-nous au dirigeant de Nvidia. Jensen Huang est un Américano-Taïwanais immigré aux États-Unis en 1973, qui a fondé sa société avec un investissement personnel de 200 dollars, identique à celui des deux autres cofondateurs. En 32 ans, Nvidia est devenue la première capitalisation mondiale, avec plus de 4 378 milliards de dollars. Soit une fortune de 156 milliards de dollars pour Jensen Huang.

Ses propos sont rassurants, avec un potentiel de 3 000 à 4 000 milliards de dollars en dépenses d’infrastructure en IA d’ici la fin de la décennie. De plus, de nouvelles applications surgissent. Par exemple le cerveau de Robot Jetson Thor, pour embarquer de l’IA dans les robots humanoïdes. En ce qui concerne la gamme produit, la nouvelle plateforme Blackwell est en phase d’accélération de production. La société dispose déjà de la génération suivante, baptisée Rubin. Elle est dotée d’une performance informatique équivalente à 100 pétaflops (unité de mesure de 10¹⁵ opérations en virgule flottante par seconde). Ceci représente cinq fois plus que la capacité maximale à terme prévue de Blackwell. Tous ces éléments nous confortent dans la faculté de Nvidia de dépasser le seuil des 200 milliards de dollars de revenus au cours de cet exercice. Et d’atteindre le cap des 300 milliards ces prochaines années.

- 49.1. L’article de la Constitution permettant au Premier ministre d’engager la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale.

- 50 %. Le taux des droits de douane imposé à l’Inde.

- 3 000 à 4 000 milliards de dollars. Les dépenses en infrastructures pour l’IA d’ici 2030, selon Nvidia.