Les marchés redoutent une nouvelle récession

C’est la rentrée et le mot qui circule actuellement le plus dans les salles de marché n’est pas « vacances » mais « récession ». En ces temps de ralentissement économique, les investisseurs voient le verre à moitié plein. Ils redeviennent, comme en 2023, allergiques à tous les signes de faiblesse d’activité. 

Il faut dire que la saisonnalité est souvent défavorable sur les actions en septembre. La performance moyenne mensuelle de l’indice S&P 500 a été tout le temps négative depuis 2020. Et elle a été en moyenne négative de 0,98% depuis 1979. Ainsi, on peut observer depuis les 44 dernières années, 24 performances mensuelles négatives avec une moyenne de -4,32% contre 20 performances mensuelles positives avec une moyenne de +2,98%. De surcroît, après un mois d’août particulièrement volatil avec un mini krach à la bourse de Tokyo, suivi par un fort rebond des marchés permettant à plusieurs indices actions de tutoyer leur précédent record, il est bon de prendre quelques bénéfices, sans toutefois céder à la panique. Tout recul jugé excessif de titres de qualité devrait constituer, selon nous, une opportunité d’investissement.

La sélectivité et le biais défensif après un fort rebond apparaît comme une stratégie de bon sens. Malgré un environnement global en croissance, certains signaux ont viré au rouge et ne peuvent pas être ignorés, même par les plus optimistes.

L’emploi américain est le sujet de préoccupation première. La hausse du chômage de juillet à 4,3% avait particulièrement inquiété la communauté financière. Pourtant, il convient de tenir compte des aléas climatiques, fortement impactés par l’ouragan Béryl.

Les données d’août devront donc démontrer s’il s’agit d’une nouvelle tendance de fond ou si c’était un accident. Néanmoins, nous sommes moins optimistes sur ce point depuis que le nombre d’emplois offerts aux États-Unis a chuté en juillet à 7,67 millions. Soit le niveau le plus bas depuis janvier 2021.

Le fameux ratio d’emplois offerts pour chaque chômeur est de facto revenu à 1,1 contre 2 au printemps 2022, au plus fort des tensions sur le marché du travail. L’indice ADP de variation d’emplois en entreprises pour le mois d’août a été positif de seulement 99 000, également au plus bas depuis janvier 2021. Néanmoins, nous ne sommes toujours pas en contraction. Le nombre d’employés dans la population active se maintient à plus de 161 millions. Bien au-delà des 159 millions d’avant la pandémie.

De plus, les nouvelles demandes d’allocations chômage restent très faibles. Elles se situent à 227 000 au 31 août, bien inférieur à la moyenne d’avant le Covid. La première conclusion est que les tensions sur le marché du travail ont disparu, car les entreprises embauchent beaucoup moins, mais ne licencient toujours pas massivement. La thèse du ralentissement économique tient donc toujours.

Néanmoins, ces faibles chiffres confortent la Fed d’initier un cycle d’assouplissement monétaire le 18 septembre. Et ce, surtout depuis que Jerome Powell a déclaré à Jackson Hole que l’institution monétaire n’accueillait plus favorablement toute faiblesse supplémentaire du marché du travail.

Les conséquences de ces futures baisses de taux sur la valorisation des actifs financiers sont positives, avec une augmentation des multiples. Contrairement à ce que l’on pense, la période de un à deux mois avant et après la première baisse des taux de la Fed est historiquement défavorable pour les marchés actions. En effet, les investisseurs redoutent le pire. Cette faiblesse est vite corrigée en cas de résilience économique, comme démontrée dans notre édito de la semaine dernière, avec les statistiques historiques des performances de l’indice S&P 500 lors des huit derniers cycles d’assouplissement monétaire.

Malheureusement à ce jour, le débat n’est pas encore tranché. Cela explique les craintes excessives du marché à la moindre faiblesse, comme un indice PMI manufacturier légèrement révisé en baisse en août à 47,9 contre 48 précédemment. Et un ISM manufacturier d’août en hausse sur le mois précédent à 47,2 contre 46,8, mais inférieur aux attentes à 47,5.

Cette angoisse n’a pas disparu, malgré des indicateurs PMI et ISM des services en hausse et supérieurs au consensus. Rien n’est perdu et restons pragmatiques dans nos investissements, mais sélectifs et défensifs.

99 000 
Les créations d’emplois en entreprises aux États-Unis en août selon l’ADP (averagedaily production), au plus bas depuis janvier 2021.

7,67 millions 
Le nombre d’emplois offerts et non pourvus en juillet aux USA, au plus bas depuis janvier 2021.

94,3 % 
Le pourcentage de nouvelles immatriculations en voitures électriques en Norvège en août. Nouveau record mondial.

Un nouveau cycle de la Fed et la fin de celui de Nvidia ?

« Le temps est venu d’ajuster la politique monétaire. La direction du voyage est claire, mais le calendrier et le rythme des baisses dépendront des données économiques et de l’évolution de la situation et de la balance des risques ».

Ces propos de Jerome Powell prononcés à la conférence de Jackson Hole ont été reçus 5 sur 5 par les investisseurs. La Fed va enfin mettre fin, le 18 septembre, au plus dur cycle de durcissement monétaire depuis quatre décennies.

« Ma confiance s’est accrue sur le fait que l’inflation est sur une tendance durable d’un retour à 2% ». L’attention de la banque centrale américaine n’est plus focalisée sur l’inflation. Désormais, elle se porte sur le deuxième objectif de son double mandat, à savoir maximiser durablement l’emploi.

Quelles sont les conséquences de ce changement de paradigme pour les actifs financiers et pour les portefeuilles ? Et ce, alors que les résultats de Nvidia sont excellents mais insuffisants pour provoquer une nouvelle ruée vers les valeurs de l’intelligence artificielle ?

Que dit l’histoire ? Depuis 1980, il est possible d’identifier huit cycles majeurs de baisse de taux de la Fed de plus de 1%.

Les cinq cycles initiés avant l’an 2000 se sont traduits par des performances positives du marché actions (indice S&P 500 hors dividendes) douze mois après la date de la première baisse de taux : +33,66% (douze mois après le 01/04/1980), +34,48% (01/04/1982), +12,70% (02/10/1984), +13,85% (05/06/1989) et +18,67% (06/07/1995).

Après l’an 2000, le bilan des trois cycles de baisses est beaucoup plus mitigé. On recense deux performances négatives pour une seule positive, avec des chocs économiques :  -13,53% (03/01/2001), -23,91% (18/09/2007) et +8,92% (31/07/2019). 

Actuellement, comme dans les années 1980, nous sommes en période de désinflation et de ralentissement économique. Nous pouvons donc pencher pour la thèse d’un impact favorable de l’assouplissement monétaire sur les actifs financiers, dont les valeurs de croissance et les défensives (santé y compris). La clé sera donc de ne pas basculer vers un cercle vicieux de faiblesse économique et de baisse des profits des entreprises. C’est pourquoi, le marché sera plus sensible, selon nous, aux données économiques, qu’aux nouvelles liées aux politiques monétaires.

Les résultats de Nvidia étaient la publication la plus attendue de ce deuxième trimestre. Certains médias ont même qualifié cet évènement comme étant le plus important de l’année. Il est vrai qu’une frénésie vers les valeurs technologiques, plus précisément vers celles spécialisées dans l’intelligence artificielle, s’était produite après le 22 mai. A la suite des excellents chiffres du trimestre précédent.

Les flux colossaux enregistrés vers les fonds spécialisés dans ce type de valeurs (l’équivalent de 6% de leurs encours totaux), avaient provoqué une hausse de plus 40% du titre Nividia et de 12,8% du NASDAQ 100 jusqu’au 18 juin.

Malgré une hausse de 122% des revenus de la société et de 168% du bénéfice par action sur un an, le titre a clôturé en baisse de 6,38% le lendemain de la publication.

On peut identifier plusieurs raisons à cette déception. La première est d’une évidence absolue : tous les investisseurs autorisés à posséder des actions détiennent massivement Nvidia en portefeuille. En effet, sa capitalisation boursière avait dépassé le seuil des 3 000 milliards de dollars en juin !

La deuxième est liée au phénomène de taille. En effet, le chiffre d’affaires trimestriel a été multiplié par 5 en 18 mois, passant ainsi de 6 à 30 milliards d’euros. La croissance ralentit mécaniquement et se normalise à un niveau qui reste important. La troisième est la valorisation élevée de plus de 41 fois les résultats anticipés de l’année en cours. Ceci n’autorise aucun grain de sable dans la machine, comme une baisse des marges.

Rassurons-nous ! La société prévoit une augmentation séquentielle prudente de plus de 8% de son chiffre d’affaires au prochain trimestre. Les analystes s’attendent à une progression de plus de 40% pour celui de l’année prochaine et de 20% par an pour les années suivantes. Le titre est toujours en progression de 137% depuis le début de l’année et de 705% depuis fin 2022 !

Ses performances futures seront plus réduites et conformes à la croissance des bénéfices. La nouvelle unité de traitement graphique (GPU) Blackwell, qui devrait être lancée avant la fin de l’année sera, selon la société, un beau succès commercial.

168 %
La croissance du bénéfice par action sur un an glissant de Nvidia au 2ème trimestre.

1 009 milliards de dollars 
La capitalisation boursière de Berkshire Hathaway, seule société américaine en dehors de la technologie, ayant atteint ce niveau, la veille des 94 ans de son principal actionnaire Warren Buffet.

Bourse Tokyo : gros Yo-Yo du Kabuto-Cho      

C’était un véritable lundi noir à la bourse de Tokyo ! Les indices Topix et Nikkei ont enregistré une perte à la clôture de plus de 12% par rapport à vendredi soir. Ce 5 août restera dans les annales, comme la deuxième pire séance de la bourse de Tokyo. Fort heureusement, les pertes de ce mini-krach ont été fortement réduites le lendemain et le surlendemain . Avec un rebond cumulatif en deux jours de plus de 11%. 

L’indice VIX représente la volatilité implicite en temps réel sur les options négociées sur le CBOE de Chicago sur le sous-jacent de l’indice S&P500.

Celui-ci a flambé ce lundi 5 août. Il a affiché un plus haut à 65 une heure avant l’ouverture du marché américain pour clôturer la journée à 38. Contre 20 en début d’après-midi le vendredi précédent. Ce pic constitue la troisième plus forte tension jamais enregistrée après celle survenue au cours de la pandémie de mars 2020 (85) et durant la crise financière de 2008 (89). Cet excès de peur s’est traduit par une baisse en séance de 6,5% pour le future Nasdaq 100 et de plus de 15% pour le titre Nvidia, avant de limiter la casse à la fin de la journée à respectivement plus de 3% et moins de 6%.

C’est une accumulation de plusieurs facteurs au même moment qui ont provoqué ce mini-krach aussi brutal qu’inattendu. Tout d’abord, il convient de planter le décor. Avant cet évènement, investir sur la bourse de Tokyo était une des stratégies d’investissement favorites des opérateurs, avec celle des 7 magnifiques aux États-Unis dont Nvidia. Ainsi, l’indice Nikkei a battu ses précédents records datant de fin 1989 et accumulait une performance dividendes réinvestis de plus 66% en devise locale entre fin 2022 au 11 juillet dernier. Soit bien au-dessus de celle de l’indice S&P500 américain (+50% en dollar) et des indices européens Euro Stoxx 50 (+40%) et CAC40 (+25%). 

Ensuite, le financement à court-terme est actuellement quasi gratuit en yen à 0,25%, comparé au coût de 5,50% en dollar et à celui de 3,75% en euro. Cet écart important s’explique par le plus fort durcissement monétaire depuis 40 ans adopté par la FED et par la BCE depuis la création de l’euro. Tandis que ces deux institutions relevaient massivement leurs taux directeurs en 2022 et 2023, la Banque du Japon était restée inactive. Trop contente de voir enfin de l’inflation, après avoir lutté en vain pendant plusieurs décennies contre le mal de la déflation. Les conséquences ont été immédiates et perverses.

Le yen est devenu la devise de financement favorite. En effet, elle est peu chère avec des taux quasi nuls, voire négatifs en réel si l’on déduit l’inflation japonaise. Une des opérations favorites était celle dite de portage ou de carry trade. Celle-ci consiste à emprunter en yen et à placer la somme équivalente en dollar après une opération de change (de vente de yens contre un achat de dollars). Ceci permet d’empocher sur la durée l’écart de rémunération entre les deux devises. Dans une note récente, J.P.Morgan estimait à 4 000 milliards de dollars, les montants consacrés à de telles opérations. Un chiffre colossal !

Cette pratique a été tellement adoptée que sa conséquence a été la forte baisse de la devise nippone qui s’était dépréciée de 14% contre le dollar depuis le début de l’année. Les opérateurs gagnaient sur les deux tableaux, c’est-à-dire sur le portage et sur le gain de change, car ils étaient emprunteurs d’une devise qui se dépréciait.

À la surprise générale, la BoJ a augmenté ses taux directeurs à 0,25% le 31 juillet. Dans son compte-rendu de sa réunion, il est stipulé que l’objectif des gouverneurs est de durcir davantage la politique monétaire. La possibilité de voir les taux à 1% d’ici la mi-2025, avec de surcroît une diminution de la taille du bilan de la banque centrale est non négligeable.

Le même jour Jerome Powell affirmait que le sentiment général du comité était que l’économie arrivait à un point où il était approprié de baisser les taux directeurs. Cette phrase à immédiatement provoqué une baisse anticipée des taux directeurs de 0,75% d’ici fin 2024. Cette double perspective entre une BoJ qui va augmenter ses taux directeurs et une FED qui va les baisser, a provoqué un renchérissement du yen contre le dollar. Et a créé une menace sur les opérations de portage décrites précédemment, entrainant un début de débouclement brutale de ces positions. 

Les dernières données économiques outre-Atlantique pointaient vers un ralentissement de l’activité. L’indice ISM manufacturier de juillet publié le 1er août a confirmé cette tendance, avec une baisse supérieure aux attentes à 46,8 contre 48,5 le mois précédent.

L’indice des nouvelles commandes s’est également nettement dégradé à 47,4 contre 49,3 en juin. Les données de l’emploi américain ont ravivé les craintes d’une récession, avec un taux de chômage à 4,3% en juillet contre 4,1% en juin. Les investisseurs ressortent avec stupéfaction la règle de l’économiste Claudia Sahm. Cette dernière prédit une récession quand le taux du chômage augmente de 0,50% lors des 3 derniers mois.

C’est effectivement le cas depuis mars dernier où la donnée était à 3,8%. La conséquence a été immédiate. Les anticipations voient une baisse des taux de la FED de 1,39% d’ici janvier 2025. Et une ruée vers les actifs les plus sûrs (emprunts d’État), au détriment des actions, notamment les plus cycliques. Néanmoins, nous estimons que les données de l’emplois de juillet sont faussées par une augmentation importante de la population active et un nombre élevé de personnes (plus de 400 000) ne pouvant pas exercer à cause des conditions météorologiques, notamment de l’ouragan Béryl. 

L’ensemble des signaux évoqués, à savoir une probabilité de récession plus prononcée, une hausse des indices de volatilité, une remontée du yen et à terme, une réduction de l’écart des taux de rémunération entre devises, ont provoqué une forte réduction du risque dans les portefeuilles. Cela s’est traduit pour les fonds spéculatifs par une forte baisse du levier. En clair, par des ventes massives du dollar au profit du yen.

Egalement des ventes d’actions où les expositions sont les plus importantes, à savoir les actions japonaises et technologiques et des achats d’emprunts d’État. Certaines banques évoquent une cession cumulée de plus de 60 milliards de dollars de ces acteurs, qui devrait s’achever cette semaine. L’importance de ces flux, dans une période de l’année où la liquidité est traditionnellement réduite, explique le fort décrochage des indices concernés par ces mouvements. La baisse de plus de 10% des valeurs liquidatives des fonds CTA depuis début juillet indique clairement qu’ils étaient les plus vulnérables et sont donc les plus concernés par ces cessions.  

Si la volatilité est l’ennemi du spéculateur, les cours bradés sont les amis de l’investisseur à long terme. Plus les variations sont élevées, plus les risques sont importants dans les livres des spéculateurs à court-terme. Cela se traduit par des pertes latentes plus importantes et des décisions malheureuses de vendre au plus bas pour couper ses positions. En revanche, des cours bradés constituent une excellente affaire pour l’investisseur à long terme, afin de construire son portefeuille à moindre coûts. La chute des bourses de lundi dernier a été l’opportunité d’acheter des titres à des prix inespérés.

Selon nous, la volatilité devrait se prolonger durant au moins tout le mois d’août, ce qui devrait étendre la période de bonnes affaires, notamment sur les valeurs de croissance. D’un autre côté, les séances de fort rebond, seront les occasions d’alléger les titres les plus fragiles ou plus vulnérables dans un cycle de ralentissement économique. Maintenir une poche importante de liquidités et être sélectif et agile nous semble être une stratégie adaptée pour la suite de l’été.

Résultats T2 2024 : peu de médailles pour les sociétés cotées !

Nous sommes aux deux tiers de cette saison de publication des résultats du 2ème trimestre. Malheureusement l’ambiance actuelle est loin de l’euphorie des Jeux Olympiques, où nos sportifs accumulent les médailles.

Comme toujours, il y a les faits et le ressenti ou plutôt l’objectif et le subjectif. Sur le plan statistique, les données sont globalement satisfaisantes, mais avec beaucoup de dichotomie entre les zones géographiques, les secteurs et les valeurs. Du côté positif, retenons que la croissance des bénéfices par action sur un an glissant redevient positive en Europe (+1,7% pour les entreprises de l’indice STOXX Europe 600), ce qui constitue un point d’inflexion depuis le 1er trimestre 2024. 

Cela sera-t-il suffisant pour soutenir les marchés en août, un mois historiquement très volatil ?

Les États-Unis surperforment, une fois de plus, les autres zones géographiques. Ainsi, la croissance des ventes des entreprises américaines sur un an glissant ressort à 5,2% contre 0,5% pour celles du Vieux Continent.

Celle des bénéfices par action reste impressionnante à 12,4% contre 1,7% en Europe. Cependant, tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. En effet la progression des bénéfices par action des secteurs défensifs est supérieure à celle des secteurs cycliques. Et ce, des deux côtés de l’Atlantique (18% contre 5% aux États-Unis et +7% contre -7% en Europe).

Ce fort écart explique le mouvement de rotation sectorielle observé depuis plusieurs séances, en faveur d’entreprises moins sensibles à l’activité économique. Ce qui est notamment le cas des entreprises du secteur de la santé.

Si on pousse l’observation plus loin, la zone euro est à la traîne. Et ce, même en comparaison avec le continent européen. En effet, la zone euro est en décroissance de 3% en ce qui concerne les bénéfices par action.

Seulement 56% des entreprises ayant publié ont battu le consensus sur leur bénéfice par action. Et une minorité ont dépassé les attentes concernant leurs revenus. Ces chiffres négatifs expliquent la désaffection actuelle des investisseurs pour notre espace économique, auquel s’ajoute l’imbroglio politique en France.

À cela s’ajoute un pessimisme ambiant, après l’euphorie du 1er semestre. Les récents évènements au Moyen-Orient, ainsi que l’annonce d’un ISM manufacturier en baisse et en zone de contraction aux États-Unis, ont incité les stratèges à baisser le risque dans les portefeuilles. On ressent une vague de ventes sur des titres avec des fortes plus-values et fortement détenus, y compris dans la technologie. Ce secteur connait actuellement une forte volatilité, tant au niveau des indices que sur les valeurs.

La performance des titres après l’annonce de leurs résultats dépend non seulement de la qualité de ceux-ci, mais également de l’atmosphère des marchés. À ce jour, le nombre de relèvements de prévisions annuelles des sociétés en Europe est au plus bas depuis 2020. Ce manque de perspectives positives, même en cas de publication satisfaisante, explique la performance médiane négative des titres le jour de leur publication. Les déceptions sont fortement sanctionnées et peu de bonnes surprises sont appréciées par le marché. 

Dans le luxe, la médaille d’or a été une nouvelle fois décernée à Hermès International. L’entreprise enregistre une croissance organique de 13%, à taux de change constant.

Même si on est loin des 28% du 2ème trimestre 2023, le bilan est beaucoup plus positif que celui de tous ses concurrents, y compris celui de LVMH. En effet, la plus grosse capitalisation boursière du CAC 40 a fortement déçu. LVMH enregistre une progression de 1% de son chiffre d’affaires à taux de change constant, soit une décroissance de 1% en euro.  

La Chine ainsi que les vins et spiritueux, expliquent cette contreperformance, avec comme sanction une baisse de 4,66% du titre au cours de la séance suivante.  Les nombreuses déceptions parmi les acteurs dans le luxe expliquent le mouvement actuel de désaffection. Le titre Hermès International cote moins cher aujourd’hui qu’à la veille de sa publication de résultats. En cas de baisse plus prononcée d’ici la fin du 3ème trimestre, ce pessimisme  peut constituer une opportunité d’investissement à long terme. Les investisseurs défensifs et  sélectifs devraient bien s’en sortir selon nous ces prochaines semaines, malgré une plus forte volatilité des marchés.

46,8 
L’indice ISM manufacturier américain de juillet, au plus bas depuis novembre dernier

27 %  
La  croissance organique de Microsoft dans Azur et les services du cloud au dernier trimestre   

Paris – Jeux Olympiques 2024, eldorado ou fardeau ?

La France les attendait depuis un siècle. Paris accueille pour la troisième fois de son histoire (après 1900 et 1924) les Jeux olympiques d’été.

On attend plus d’un milliard de téléspectateurs pour la cérémonie d’ouverture de ce soir, qui se tiendra pour la première fois en dehors d’un stade, et jusqu’à 4 milliards en audience cumulée sur la période, selon le Comité International Olympique (CIO).

Ce dernier affirme également, que la couverture médiatique sera la plus grosse production audiovisuelle jamais réalisée au monde, avec 500 000 heures de contenus, tous supports confondus. Les ambitions sont énormes : les 10 500 athlètes des 205 délégations vont défiler sur la Seine en bateau sur un parcours de 6 kilomètres. Cela va permettre à 326 000 spectateurs d’admirer le spectacle, un chiffre jamais égalé, à comparer avec le précédent record des Jeux olympiques de Londres de 1948 à l’ancien Wembley Stadium (127 000 places).

La sécurité sera évidemment un enjeu crucial et nécessite la présence de 45 000 policiers rien que pour l’évènement d’aujourd’hui, accompagnés jusqu’à 1 800 collègues étrangers, 20 000 militaires et 22 000 agents privés mobilisés tout au long de ces jeux. De plus, l’espace aérien sera interdit dans un rayon de 150 kilomètres, entraînant la fermeture de tous les aéroports parisiens, ainsi que celui de Beauvais. Il faut parer à toute éventualité, même celle d’une cyberattaque.

Et qui va payer, pour quels impacts économiques ? 

Pour y répondre, il convient de remonter le temps jusqu’au 13 septembre 2017. Pour rappel, c’est la date à laquelle Paris se voit officiellement confier l’organisation de la XXXIIIème Olympiade. L’engagement financier de la France s’est matérialisé par la loi n°2018-202 du 26 mars 2018 relative à l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.  

Selon l’article 29, le Parlement a donné mandat à la Cour des comptes de contrôler les personnes morales bénéficiant de fonds publics pour la préparation de cet évènement. Comme toujours, le budget a été révisé à la hausse. Il atteint désormais la somme de 8,8 milliards d’euros.

Cette enveloppe est divisée en deux parties. 4,38 milliards pour le COJOP (Comité d’organisation des Jeux olympiques de Paris) et presque autant pour la SOLIDEO (Société de livraison des ouvrages olympiques).

Selon lui, le budget de Paris 2024 est financé en quasi-intégralité (96 %) par des recettes privées. C’est-à-dire en provenance du CIO qui reverse les droits télévisuels, des entreprises partenaires, de la billetterie des Jeux ou encore des licences. 

La SOLIDEO finance les 64 infrastructures nécessaires au bon déroulement des Jeux. C’est le cas du village des athlètes et les sites des compétitions. Son budget est financé par les promoteurs immobiliers et le reste par l’État et les collectivités locales et territoriales. En mars dernier, le premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, a déclaré que le coût réel total d’argent public pourrait s’élever entre 3 et 5 milliards d’euros. L’hypothèse maximale ferait grimper l’enveloppe globale vers les 10 milliards d’euros.

Selon l’INSEE, le surplus de croissance au 3ème trimestre lié aux Jeux Olympiques s’élèverait à 0,3 % du PIB. Soit plus de 9 milliards d’euros. À cela, s’ajoute la contribution antérieure liée à toutes les dépenses en infrastructures et activités diverses. L’institut évalue à plus de 45 millions d’heures de travail nécessaires pour l’organisation et la réalisation des ouvrages. Les pics d’activité se situaient en 2022 et en 2023.

L’emploi dans le bâtiment et les services évènementiels et de sécurité est le grand gagnant de Paris 2024. D’autant qu’il a concerné des zones défavorisées socialement (principalement en Seine Saint-Denis).

L’État verra donc sa dette actuelle de plus de 3 000 milliards d’euros progresser de quelques milliards. Une facture qui semble raisonnable pour le surplus de croissance cumulée depuis 2017, contrairement aux collectivités et notamment la ville de Paris avec une somme évoquée de 500 millions d’euros.

Si l’on compare aux 6 grammes d’or contenus dans chaque médaille d’or que gagneront nos athlètes, c’est astronomique ! Si l’on inclut toutes les retombées économiques, sociales et médiatiques pour notre pays, alors c’est une dépense faite à bon escient. 

4 milliards de téléspectateurs
l’audience cumulée des Jeux Olympiques de Paris, selon le CIO pour 500 000 heures de production audiovisuelle.

0,3 %
Le surplus de croissance du PIB au 3ème trimestre pour la France, selon l’INSEE.

6 g d’or 
La quantité d’or contenue dans chaque médaille d’or aux JO de Paris.

America First !

C’est dorénavant un miraculé, qui a frôlé la mort de quelques centimètres.

En échappant à cet attentat – en ayant eu l’instinct de survie de se coucher mais également celui se relever le poing levé – Donald Trump a changé de statut politique. Il est devenu en quelques secondes, en ce samedi 13 juillet à 18h08 heure locale, un guerrier survivant quasi indestructible. Comme un super héros tant adoré aux États-Unis.

Les conséquences de cet évènement ont été immédiates : une percée dans les sondages devant son rival si affaibli, Joe Biden, et une position confortée de favori dans la course à la présidentielle américaine du 5 novembre prochain. 

Le marché a fait clairement son choix en votant pour l’ancien président et non pour l’actuel occupant de la Maison-Blanche.

Comme toujours, les investisseurs voient au-delà, en anticipant un Congrès totalement sous contrôle des Républicains. Actuellement, chaque camp contrôle une Chambre, avec les Démocrates légèrement majoritaires au Sénat (51 contre 49) et les Républicains contrôlant la Chambre des Représentants avec une courte majorité (220 contre 213). Ce partage du Parlement est traditionnellement perçu comme un gage de stabilité politique. C’était le scénario avant le week-end dernier. Le balancier a clairement basculé en faveur du parti du challenger. Il est désormais envisageable de se projeter avec une victoire totale et les pleins pouvoirs attribués à Donald Trump et ses alliés.

Dans ce cas, on aurait affaire à un président débridé et non ficelé. Synonyme de décisions et de lois radicales, dont l’onde de choc irradierait non seulement Wall Street, mais aussi les autres bourses mondiales.

Les réactions ont été violentes, voire caricaturales. Le lendemain de la tentative d’attentat, le titre du célèbre fabricant de pistolets Smith & Wesson Brands a gagné 11,40 %. Et celui de l’opérateur de prisons privées GEO Group 9,3 %.

En réalité, nous assistons à une grande rotation dans les portefeuilles. Avec de surcroît des flux massifs vers les actions et les obligations américaines. Les chiffres de la semaine écoulée sont sans appel :  48,6 milliards de dollars de collecte ont été enregistrés dans les ETF d’actions américaines, contre une décollecte de 1,4 milliard de dollars dans les ETF d’actions européennes. Dans une nouvelle ère Trump, les investisseurs ont fait leur choix entre les deux continents pour le slogan America First.  

Au niveau des mouvements sectoriels, il est intéressant d’observer, sur la semaine (du 11 au 18 juillet), la baisse de l’Indice NASDAQ Composite de 2,25 % contre une progression de 2,29 % de l’indice Dow Jones et surtout la progression de 3,45 % de l’indice Russell 2000. Ce dernier est constitué de petites et moyennes capitalisations dont l’activité est beaucoup plus domestique.

La nouvelle politique redonnerait donc un coup de fouet à la vielle économie américaine. Boursièrement, cela signifie un mouvement de rééquilibrage outre-Atlantique vers les valeurs cycliques au détriment des grandes valeurs de croissance, notamment des 7 Magnifiques, dont l’écart de valorisation avait atteint des sommets historiques.

Est-ce le début de la fin pour ces titres ? Nous ne le pensons pas, car nous voyons plutôt une normalisation saine des performances de l’ensemble de la cote, avec toujours de bons chiffres à venir pour les valeurs technologiques. 

Dans une interview de Donald Trump publiée par Businessweek le 16 juillet dernier, il est possible de deviner de ce qui serait décidé. Les tarifs douaniers sont un formidable moyen de pression économique vis-à-vis des autres pays. Le dollar est trop fort surtout vis-à-vis du yen et du renminbi.

La meilleure façon de réduire l’inflation est de faire baisser le prix de l’énergie. Pour y arriver, il suffit d’extraire davantage « l’or liquide ». C’est-à-dire le pétrole dans le sous-sol des États-Unis.

Les voitures électriques et l’énergie solaire sont des équipements formidables, mais qui nécessitent des subventions colossales et des surfaces à exploiter irréalisables. Tout est limpide : plus de consommation d’hydrocarbures à un prix réduit et moins d’investissement dans les énergies renouvelables. Une politique qui favorise l’Amérique au détriment des autres nations.

Cette perspective de bras de fer, propulse l’or à des nouveaux sommets historiques. Les investisseurs s’attendent donc à un monde plus bipolarisé et tendu. Ils cèdent en investissant davantage aux États-Unis. 

48,6 milliards de dollars
La collecte sur la semaine écoulée des ETF actions américaines

+13,4 %
La hausse du titre du fabricant de pistolets Smith & Wesson Brands, au cours de la séance qui suivit la tentative d’assassinat de Donald Trump

La saison des résultats du 2ème trimestre 2024 est ouverte !

Les investisseurs vont pouvoir laisser de côté la géopolitique pour se concentrer sur la santé financière et extra-financière des sociétés.

La saison des résultats du deuxième trimestre vient de débuter ! Cette période est cruciale pour conforter les prévisions annuelles des entreprises. Le moindre faux-pas sera automatiquement sanctionné et les bonnes nouvelles ne sont pas forcément saluées par le marché.

Quelles sont les publications importantes et particulièrement scrutées par la communauté financière ? Les anticipations actuelles sont-elles trop optimistes ou pessimistes ? 

Aux États-Unis, les analystes sont plutôt confiants. En effet, ils anticipent, en 2024, une croissance de plus de 10% des bénéfices par action pour les sociétés de l’indice américain S&P 500.

Le fait très encourageant est l’absence de révisions baissières depuis plusieurs mois.

Toutefois, cette belle performance est rendue possible grâce aux 7 magnifiques. Si on les exclut, la progression des bénéfices par action des 493 autres entreprises ne serait plus que de 3%. Et ce, avec une tendance négative !

Par conséquent, la bonne tenue du marché américain dépend plus que jamais de ces 7 titres exceptionnels, dont les estimations ne font que de s’améliorer grâce à l’intelligence artificielle et dont la pondération représente désormais un tiers de l’indice S&P 500.

Ce risque de concentration inquiète de plus en plus de stratèges. Rendez-vous donc dès le 25 juillet avec les annonces de Microsoft où on attend une progression de 16% des revenus et de 22% du résultat net. En attendant, rassurons-nous comme nous le pouvons avec les ventes et le résultat opérationnel du deuxième trimestre de Samsung Electronics qui sont ressortis respectivement 19% et 12% au-dessus des attentes, grâce au boom de l’intelligence artificielle, ce qui est de bon augure pour les stars américaines. 

En Europe, le son de cloche est totalement différent. La croissance des profits est quasi nulle voire légèrement négative pour 2024 aussi bien pour l’indice STOXX Europe 600, que pour l’Euro Stoxx50 et le CAC40.

BP et Repsoil viennent d’annoncer de lourdes provisions à cause de leur activité raffinage. Même dans la technologie, l’euphorie n’est pas au rendez-vous car Dassault Systèmes vient d’abaisser ses prévisions annuelles, alors même que l’activité Cloud reste bien orientée. Nous attendons avec impatience les bonnes nouvelles.

Le calendrier des publications va désormais s’accélérer. A partir du 22 juillet, plus de 80% des sociétés vont publier.

Nous allons donc rentrer très vite dans le vif du sujet avec les banques américaines (JP Morgan Chase &Co, Citigroup et Wells Fargo). Même si leur pondération dans l’indice S&P 500 est désormais faible (moins de 4%), leur bonne santé est indispensable pour rassurer sur l’état général de l’économie.

Ce trimestre est d’autant plus intéressant que nous sommes plus d’un an après le sauvetage de Sillicon Valley Bank et de Crédit Suisse en Europe. Dorénavant, les inquiétudes se portent sur l’immobilier commercial, malmené depuis la pandémie avec l’avènement du télétravail et également la hausse des taux longs, provoquée par le durcissement monétaire des banques centrales. 

Les points forts de la semaine prochaine concerneront la santé, avec la publication de Johnson & Johnson le 17 juillet, considérée comme un véritable baromètre pour le secteur avec ses deux activités distinctes dans la pharmacie et les équipements médicaux, puis avec Novartis en Europe le 18.

En France, nous scruterons tout particulièrement le chiffre d’affaires de LVMH le 23 juillet. Notre champion national devra absolument convaincre pour booster le secteur, dont la pondération dans l’indice CAC 40 représente plus de 20%.

Les indicateurs PMI et ceux des surprises économiques sont en train de s’effriter des deux côtés de l’Atlantique. Ce sont des signes avant-coureurs d’un affaiblissement de la croissance. Il est fort probable que la grande majorité des entreprises soient prudentes dans leurs perspectives pour le second semestre. Et ce, en dépit d’un deuxième trimestre qui montait en cadence en Europe avant les élections législatives françaises.

De ce fait, les rares bons élèves méritent une prime de qualité et verront leurs cours de bourse récompensés. Nous vivons une période particulière, avec une concentration forte de bonnes performances boursières et une pléthore de déceptions. Plus que jamais la sélectivité s’impose. 

0,1%
L’inflation américaine au  mois de juin, soit 3% sur un an glissant contre 3,3% le mois précédent 

Assemblée nationale : vivement le dénouement !

Le 2ème compte à rebours s’est déclenché mardi soir après la clôture du dépôt des candidatures pour le second tour des élections législatives anticipées.

Nous sommes désormais à 48 heures du scrutin final tant redouté depuis 4 semaines. Cette période semble courte pour les politiciens mais horriblement longue pour les investisseurs. Et plus précisément pour les entrepreneurs, qui ont probablement gelé les embauches et les investissements, face à un environnement économique jugé incertain.

Frank Knight, considéré comme le fondateur de l’école d’économie de Chicago, a introduit en 1921 la distinction entre risque, hasard connu et quantifiable, et incertitude (le hasard non connu). Dans la nuit du 7 juillet, nous connaîtrons la répartition des sièges de la future Assemblée nationale. Mais probablement pas encore la composition du Gouvernement.

Selon les dernières projections, et à cause d’une forte vague de désistements ayant réduit le nombre de triangulaires de 306 à 89, aucune force politique ne devrait obtenir une majorité absolue. Ce serait un fait inédit depuis la création de la Vème République, ouvrant une nouvelle ère politique jamais vécue en France.

Probablement et certainement pas.

Tout d’abord parce que cette situation a existé en Belgique et en Italie dans le passé. Ensuite l’État français continuera de fonctionner, avec peu de marge de manœuvre certes, mais avec des rapports tendus entre le Président, le Gouvernement et le Parlement. 

Selon l’article 8, le Président de la République nomme le Premier ministre. Et sur la proposition du Premier ministre, il nomme les autres membres du Gouvernement et met fin à leurs fonctions. Dans le cas d’une assemblée plurielle et sans majorité, le chef de l’État devra donc choisir un Premier ministre assez consensuel, qui devra composer un gouvernement d’union nationale, avec des ministres probablement issus de toutes les couleurs politiques.

Ce sera en réalité un vrai jeu du chat et de la souris entre le Gouvernement et le Parlement composé de l’Assemblée nationale et du Sénat. Ainsi selon l’article 20, le Gouvernement détermine et conduit la politique de la nation et selon l’article 24, le Parlement vote la loi et contrôle l’action du Gouvernement.

On comprend tout de suite que la situation peut se verrouiller rapidement en période de tension, avec des motions de censure à la clé.

L’article 38 permet de prendre des mesures par ordonnances

Heureusement, l’article 38 stipule que le Gouvernement peut, pour l’exécution de son programme, demander au Parlement l’autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi. Le dernier point important à soulever est la distinction entre un projet de loi, déposé par le Gouvernement et une proposition de loi, déposée par un député ou un sénateur.

Selon l’article 40, les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d’une charge publique. Par conséquent, le scénario le plus probable à l’issue du second tour est l’absence de nouvelles réformes et de nouvelles lois fortement dispendieuses, ainsi que des budgets non votés. En théorie, un Parlement ne pourrait que voter une augmentation forte de la fiscalité. 

Cette situation confuse sur le plan politique durerait au minimum l’année qui suit l’élection législative (période avant une potentielle nouvelle dissolution). Elle ne devrait donc pas bousculer l’environnement économique et la vie des entreprises au quotidien.

De ce fait, les champions de la bourse de Paris continueront à croître, portés davantage par leurs activités à l’international. Néanmoins, la France qui était la destination européenne préférée des investissements étrangers devrait perdre en attractivité. De surcroît, la réduction du déficit budgétaire que nous impose la Commission européenne ne sera pas mise en œuvre.

Nous serons donc visés par une amende. Et les créanciers exigeront une prime de risque supplémentaire pour détenir notre dette obligataire. Pour le moment, allons voter le 7 juillet et mettons nos émotions de côté pour investir nos actifs financiers sur des critères pragmatiques et de bon sens.

De belles opportunités existent à l’issue de ventes massives depuis le 10 juin et qui ne demandent qu’à être achetées. « L’incertitude, c’est encore l’espérance » a écrit Alexandre Dumas !

89
Le nombre de triangulaires au second tour des élections législatives, après 217 désistements 

48,8  
L’ISM des services aux USA, au plus bas depuis mai 2020, année de la pandémie

Elections législatives : quand les urnes font trembler les marchés

Nous sommes 48 heures avant le premier tour des législatives françaises anticipées. Les investisseurs retiennent leur souffle avant un potentiel changement radical de gouvernement. Allons-nous connaître un nouvel avis de tempête, ou bien le bateau de la bourse de Paris réussira-t-il une nouvelle fois à naviguer contre vents et marées ? Faut-il vendre ou acheter le jour des résultats ? Que dit l’Histoire sur les différents scrutins en Europe, qui ont secoué le navire, sans jamais avoir réussi à le couler ? 

Le Vieux Continent a connu plusieurs raz-de-marée électoraux ayant fait chuter les marchés. Un des plus violents de cette dernière décennie a été, sans aucun doute, le vote britannique surprise du 23 juin 2016 en faveur du Brexit.

Le lendemain, les bourses européennes perdaient plus de 8 %. Une des plus mauvaises séances depuis la crise financière de 2008, tandis que l’indice phare de Londres baissait de plus de 3 %. Un mois et six mois après cette terrible séance, l’indice Euro Stoxx 50 reprenait respectivement 7 % et 17 %, alors que l’indice londonien FTSE 100 s’adjugeait 9 % et 15 % sur les mêmes périodes. Les vendeurs ont factuellement eu tort et ces chocs ont donc constitué un point d’entrée pour acheter. 

C’est le même constat pour les élections législatives italiennes du 25 septembre 2022. Une élection gagnée par une coalition de droite et extrême droite, menant Giorgia Meloni au pouvoir en tant que présidente du Conseil des ministres le 22 octobre. Un mois et trois mois après le scrutin, la bourse italienne avait progressé de 5,6 % et de 14,3 %.

Les promesses radicales prononcées durant toute la campagne ont donc fait place à des mesures plus réalistes pour cette anti-européenne convaincue. L’expérience anglaise du Brexit a en réalité calmé les ardeurs de nombreux partisans de « l’Italexit », ainsi que du « Dexit » en Allemagne et du « Frexit » en France.  

S’il ne faut pas vendre après le résultat d’une élection, il vaut mieux réagir avant. Les marchés anglais et italiens ont respectivement baissé de 2,1 % et de 3,2 % le mois précédant les résultats. De même, un Français ayant vendu le lendemain de l’annonce de la dissolution, soit le 11 juin, quand l’indice CAC 40 clôturait à 7 789 points, a évité une perte supplémentaire de 4,50 % jusqu’au 27 juin. Celui-ci peut donc aujourd’hui attendre sereinement l’issue du scrutin, avant de décider de se racheter.

Ce fut notre stratégie face à ces trois semaines anxiogènes. 

Ceux qui ont connu l’élection de François Mitterrand le 10 mai 1981 et de son gouvernement socialo-communiste au début de son septennat se souviendont de la forte tempête boursière les jours suivants. Selon une archive de l’INA (Institut national de l’audiovisuel), seuls 10 titres sur 200 ont réussi à coter le lendemain avec une baisse de 10%.

Le reste des 190 valeurs ont finalement trouvé un équilibre les jours suivants, après un plongeon supplémentaire dépassant pour certaines 30%.

C’est l’évènement historique qui constitue un précédent. Et pour certains, il illustre les éventuelles conséquences d’une potentielle victoire du Nouveau Front Populaire. Comme toujours, l’Histoire s’est répétée et les vendeurs ont eu tort. La bourse française, au cours du premier mandat de ce président, a enregistré une des plus belles performances qui soit, avec une progression de plus de 300 % hors dividendes.

De surcroît, il convient, d’être sélectif et de détenir des titres qui ne seront pas trop pénalisés par les prochaines décisions étatiques. Attendons les faits et restons pragmatiques. Cette règle rigoureuse et de bon sens nous  semble la plus adaptée actuellement. Là aussi, les faits donnent raison à ceux qui ont fait le dos rond, même sur les secteurs les plus vulnérables. L’exemple des titres touchés par les nationalisations de 1982 démontre qu’il ne fallait pas les céder le mois suivant les élections de 1981.

Si l’on se réfère à la loi de nationalisation promulguée, le prix de rachat obligatoire proposée par la Caisse Nationale de l’Industrie (CNI), spécifiquement créée, a été la moyenne des cours cotés entre octobre 1980 et mars 1981, soit bien avant l’élection, majorée de 14 %. Les épargnants n’ont donc pas été lésés, au contraire, même s’ils ont été payés en obligations de la CNI. Avec la forte baisse des taux longs obligataires les années suivantes, l’investisseur a même pu faire une belle plus-value sur ces titres et en plus les échanger contre les sociétés privatisées après le changement de gouvernement de 1986. Patience donc !

2,1 millions  
de procurations signées pour les élections législatives, selon le ministère de l’Intérieur.

770 avions  
seront livrés par Airbus en 2024 contre une projection initiale de 800, provoquant une chute du titre de 9,41 % le 25 juin. 

Déficit budgétaire : la cigale chantera-t-elle tout l’été ?

Ce n’est pas glorieux. La France a été encore une fois mise au coin par la Commission européenne pour déficit budgétaire excessif. Notre pays fait donc partie du club des 7 cancres (Italie, France, Belgique, Hongrie, Slovaquie, Pologne et Malte) frappés par une procédure européenne. Seul lot de consolation, le bonnet d’âne a été décerné à l’Italie, dont le solde budgétaire négatif représentait 7,4 % du PIB en 2023. 

Quelles sont les origines et les conséquences de cette procédure qui peut entraîner, d’ici un an, une lourde sanction pécuniaire ? Et ce alors que les candidats promettent davantage de dépenses pour se faire élire aux élections législatives ?

Il est très surprenant de constater que déjà dans le traité instituant la communauté européenne (TCE) signé à Rome en 1957, la notion de déficit était déjà encadrée. En effet, son article 104 stipulait :

  • – Les États membres évitent les déficits publics excessifs.
  • – La Commission surveille l’évolution de la situation budgétaire et du montant de la dette publique dans les États membres en vue de déceler les erreurs manifestes. Elle examine notamment si la discipline budgétaire a été respectée.

Aujourd’hui, la procédure de déficit excessif est incluse dans l’article 126 du traité de fonctionnement de l’UE (TFE). Cette dernière confirme son attachement aux dispositions relatives au Pacte de stabilité et de croissance.

En juin 1997, les États qui souhaitent adhérer à l’euro ont signé cet engagement. Il permet de sanctionner financièrement un pays membre de la zone euro qui s’exposerait à un déficit budgétaire supérieur à 3 % du PIB. Et dont la dette publique dépasserait 60 % du PIB. Avec l’élargissement de l’euro et la crise financière de 2008, un nouveau « pacte budgétaire » a été signé en 2012. Il a pris effet au 1er janvier 2013.

Selon son article 8, la Commission européenne peut saisir la Cour de Justice pour infliger le paiement d’une somme forfaitaire ou d’une astreinte adaptée et ne dépassant pas 0,1 % de son PIB.

Soit actuellement 3 milliards d’euros pour la France.

Ce n’est pas la première fois que l’Hexagone est concerné par une telle procédure, comme le résume une communication du Sénat en mars 1998.  Dix des douze États membres de l’époque (dont l’Allemagne) ont été concernés pour la première fois en 1994. Comme toujours depuis 30 ans, les mauvais élèves ont échappé aux sanctions. Ils ont présenté des mesures rectificatives et montré leur bonne volonté pour obtenir une abrogation des procédures.

Le problème, cette fois-ci, est qu’un nouveau gouvernement siègera en France dans moins de trois semaines. Probablement avec des dépenses supplémentaires à la clé. Quelle que soit la couleur politique, celui-ci devra jongler entre les promesses, la réalité et la bonne volonté de Bruxelles. Donc des autres États membres. 

Pour autant, les investisseurs étrangers ne semblent pas, pour le moment, s’inquiéter. Ils ne se délestent pas massivement des actifs français. Ils retiennent l’exemple de l’Italie, avec l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir. Ainsi que la nomination de Giorgia Meloni en octobre 2022, en tant que présidente du Conseil des ministres.  

Ceux qui ont vendu la dette italienne – quand l’écart de taux entre le taux souverain italien et allemand à 10 ans dépassait 2,50% – ont eu tort. Celui-ci est graduellement revenu à moins de 1,30%, avant de se tendre de nouveau à plus de 1,50%, après les élections européennes.

Selon les derniers sondages, leur raisonnement se base sur le fait qu’aucune majorité n’émergerait à l’Assemblée nationale le 7 juillet au soir. Dans ce scénario, le nouvel exécutif ne pourrait passer que des lois de finance ou autres par activation de l’article 49-3 de la Constitution. Il convient d’être prudent à ce stade et d’attendre l’issue des urnes, avant de prendre une décision pragmatique.

Pour le moment, nous avons réduit dès le 11 juin notre exposition française. En effet, nous avons allégé les valeurs financières, les valeurs de service publique, de concession et d’énergie. Ces dernière étant potentiellement exposées à des gels de prix et des hausses de taxes.  

On constate une forte augmentation des dépenses dans les programmes des favoris. Elles devront être financées par des nouvelles taxes ou des annulations de crédits versés.

L’heureux élu devra donc faire preuve de grande subtilité entre les électeurs, les députés, les marchés et la Commission européenne. Afin que la France continue à être une cigale, qui va chanter encore plus fort cet été. Malheureusement, l’hiver prochain et l’année prochaine risquent d’être très rigoureux. 

3 440 milliards d’euros
La capitalisation boursière de Nvidia en séance le 20 juin, devenant la première mondiale

73 milliards d’euros
Le record de dividendes versés au titre de 2023 par les entreprises de l’indice CAC 40