Cet effet de change très négatif au 3ème trimestre 

Quel est le point commun entre LVMH, Sanofi, Schneider Electric et Air Liquide, dont les activités sont si différentes ? Toutes ces entreprises viennent de publier, au 3ème trimestre 2023, un chiffre d’affaires érodé par la forte hausse de l’euro depuis un an.

Souvenez-vous. L’année 2022 a été marquée par une nette progression du dollar, dont l’apogée était alors le 27 septembre. La hausse du billet vert depuis le début de l’année passée atteignait à cette date plus de 18 % contre un panier de devises, dont 17,76 % contre la monnaie européenne.

Depuis, le fort durcissement monétaire de la BCE, en retard par rapport à la Fed et matérialisé par un relèvement cumulé de 4 % de ses taux directeurs, a fait retourner cette tendance. L’objectif de la banque centrale était double. Tout d’abord freiner l’activité domestique en augmentant le taux du crédit. Ensuite, lutter contre l’inflation importée en faisant monter l’euro.

Nos champions du CAC 40 peuvent en témoigner, à leurs dépens. Cette politique a malheureusement abouti. Ces mastodontes ont tous une part très importante de leur activité à l’étranger. Et cette activité est facturée en devises étrangères. Par rapport au 3ème trimestre de l’année dernière, le taux de change moyen de l’euro a progressé de 8,10 % contre le dollar. Même constat contre le yen (+ 12,97 %) et le yuan (+14,34%).

L’impact négatif est différent selon la répartition géographique des revenus de chaque entreprise et selon le taux de change appliqué à chaque encaissement au cours de la période. Sur ce point, nous parlons d’un risque de change transactionnel.

De ce fait, pour mesurer sa véritable performance commerciale, une société isole les impacts liés à la variation du cours des devises. Pour ce faire, elle publie des taux de croissance organique et à taux de change constant. Par exemple, LVMH affiche une croissance organique de 9 % au 3ème trimestre. Mais ses revenus en euro n’ont progressé que de 1,06 % sur un an glissant. Dans l’hypothèse où il n’y a pas eu de changement de périmètre (cela a été confirmé sur les données à 9 mois), on peut supposer que l’effet de change était négatif de 8 % environ (7,96 % exactement).  

Pour sa part, Schneider Electric a annoncé une croissance organique de 11,5 %, mais une variation positive d’à peine 0,1 % de son chiffre d’affaires. La différence s’explique par un effet de change négatif de 7,5 % et pour le reste d’un changement de périmètre, lié principalement à la cession de ses actifs en Russie. Encore plus vexant, Air Liquide est en croissance de 1,05 % à données comparables, mais en décroissance de 17,4 % en euros, à cause d’un effet de change négatif de 6,3 % et d’une baisse du cours des matières premières servant de base pour sa facturation.

Finalement, on peut comprendre la frustration des dirigeants et des investisseurs par ces croissances rabotées, alors qu’en réalité les sociétés sont beaucoup plus dynamiques qu’on ne le pense.

Il existe plusieurs solutions.

La première est celle pratiquée par Airbus, qui utilise des outils de couverture, principalement par des ventes à terme. À fin septembre, la société a vendu à terme pour 87 milliards de dollars à un taux de change d’euro contre dollar à 1,23, soit 13 % supérieur au cours actuel. Cela paye, car l’avionneur affiche une croissance de 11,93 % de ses revenus, sans effet de change négatif.

D’autres publient en dollar, comme TotalEnergies.  La baisse de 14,6 % de ses revenus est à associer principalement à la chute de 14 % du prix du baril de pétrole. Autre fait probant, comparons l’effet de change négatif en euro de Sanofi (-7,3 %) à celui en dollar d’Astrazeneca (-1 %).

Une dernière méthode est d’adosser le mieux possible sa base de coûts à celle de ses revenus en devises. Cela permet de ne subir qu’un risque dit consolidation sur le résultat opérationnel, soit un montant beaucoup plus faible.

Dans tous les cas, le bénéfice par action de nos entreprises européennes a été impacté par la hausse de l’euro. Espérons donc que celle-ci soit moins forte pour ces prochains exercices pour la stabilité des actions européennes.

Quand les vendeurs à découvert se rachètent

Les investisseurs européens sont démoralisés, après 6 semaines consécutives de baisse des indices CAC 40 et EURO STOXX 50 entre le 15 septembre et le 27 octobre.

Une série de baisse

Il s’agit de la série la plus longue depuis juin 2012, alors en pleine crise des dettes souveraines de la zone euro. La violence du choc est douloureuse, mais malheureusement pas exceptionnelle en termes de performance négative (respectivement de -7,91 % et de -6,54 % hors dividendes). Les principaux avertissements sur les résultats et leur lourde conséquence sur les titres concernés ont effacé de la mémoire les bonnes publications.

Les estimations des bénéfices par action tiennent bon

Heureusement, les estimations des bénéfices par action pour 2023 tiennent bon et sont très peu révisées à la baisse, même si moins de 30 % des entreprises européennes dépassent les attentes en matière de chiffre d’affaires (chiffre historiquement bas). Cette faiblesse des revenus est logique et en conformité avec une contraction de 0,1 % du PIB de la zone euro au 3ème  trimestre. Alors que les actionnaires broient du noir, les marchés se reprennent enfin cette semaine.

S’agit-il d’un simple répit ou le début d’une tendance durable ?

La semaine dernière, nous avons expliqué l’importance des avertissements sur les résultats, que nous venons de vivre, sur la psychologie des opérateurs, en précisant qu’ils favorisaient les vendeurs à découvert. Ces spéculateurs, travaillant en majorité pour des hedge funds, ont gagné beaucoup d’argent depuis mi-septembre et se sont frottés les mains à chaque fois qu’un accident s’est produit sur une valeur. Ces structures financières ont la particularité de clôturer leur exercice à fin novembre et non à fin décembre.

Vague d’achat sur les titres les plus matraqués

Face à ce magot, de plus en plus lourd, de plus-values latentes, il était tentant de réaliser définitivement ces profits à quelques semaines de la photo-finish. Ce phénomène est en train de se produire actuellement avec une vague d’achats sur les titres les plus matraqués. Dans cette phase si particulière, même les mauvaises nouvelles ont beaucoup moins d’impact négatif sur le cours de bourse. Ce fut le cas dans certains secteurs, comme celui de la chimie où DSM-Firmenich a publié un chiffre d’affaires inférieur aux attentes, sans être sanctionné, car les investisseurs redoutaient le pire et ont été quelque peu soulagés. D’autres titres ont ouvert en nette baisse à la suite de l’annonce des résultats et ont même clôturé la séance sur une note positive. En l’absence de flux positif et donc d’argent frais, matérialisé par des retraits continus depuis plusieurs mois dans les fonds investis en actions européennes, il est plus probable que ces achats constituent des clôtures de position que des initiations de nouvelles lignes dans les portefeuilles.

Dans un tel cas, ce sont encore les vendeurs à découvert qui dictent la tendance et font remonter les marchés.

Il faut avouer que plusieurs éléments techniques expliquent pourquoi les spéculateurs ont arrêté provisoirement leurs juteuses pratiques. Tout d’abord, les cours de nombreuses valeurs, dont celles de belle qualité, avaient atteint un niveau plancher, dit de support, depuis plusieurs mois. Ceci n’était pas propice à des nouvelles ventes sur ces valorisations plus faibles.

L’inflation continue de ralentir et la probabilité d’une hausse des taux disparait

Ensuite, plusieurs données économiques ont calmé le marché obligataire. L’inflation continue de ralentir en octobre à 3 % sur un an glissant en Allemagne contre 4,3 % en septembre. La Fed, après la BCE la semaine dernière, a fait une pause dans son cycle de durcissement monétaire. Même si la porte est toujours ouverte à des hausses supplémentaires, la probabilité de cette éventualité a quasiment disparu pour le marché. De facto, après avoir touché un pic à 5,02 % le 23 octobre, le taux à 10 ans américain s’est replié à  4,66 % hier. Une stabilité du marché obligataire est un point important pour freiner la volatilité sur les actions. Selon les analystes de BofA Securities, ce  phénomène technique devrait se poursuivre davantage, même si nous ne sommes pas dans un rallye haussier, faute de perspectives positives sur les profits des entreprises.  

Des avertissements sur les résultats très douloureux

C’est la hantise des investisseurs. Les « profit warnings » ou avertissements sur les résultats se produisent quand une société annonce que celle-ci ne tiendra pas ses objectifs de rentabilité pour une année donnée.

Il s’agit d’une sorte de mea culpa face au marché financier.

Les « profits warnings » affectent les cours de bourse

C’est un évènement qui affecte négativement le cours de bourse de l’entreprise, car il constitue une perte de crédibilité de la direction. Dans cette situation désagréable, la clémence des investisseurs est inversement proportionnelle à leur aversion au risque.

Le problème actuellement est que celui-ci est élevé du fait de la conjonction de plusieurs conflits armés, d’une décélération économique sur plusieurs continents et de politiques monétaires restrictives. Le baromètre est donc bas et les sanctions sont lourdes en termes de pertes. Dans cette situation, les gagnants sont les vendeurs à découvert, qui profitent des malheurs des autres.

Les investisseurs capitulent

Cette semaine, les actionnaires de Worldline en savent quelque chose puisque que le titre a perdu 59 % ce mercredi 25 octobre. Pourtant, les révisions apparaissent mineures à première vue, avec une diminution de quelques pourcents de la croissance organique. Les opérateurs ont retenu la donnée la plus négative, à savoir une diminution de 38 % du free cash-flow opérationnel.  Il est évident que cette punition est excessive, mais dû à une capitulation des investisseurs, qui se débarrassent de leurs actions quoi qu’il en coûte, faute de confiance.  

Cet excès de flux (déséquilibre entre les ordres de vente et d’achat), crée un phénomène de boule de neige qui s’amplifie au fur et à mesure de la séance.

Chute d’Alstom et d’EuroApi

Malheureusement, la liste de ces avertissements s’allonge depuis plus de 3 semaines. Ce phénomène provoque une crise d’angoisse auprès des opérateurs de marché, qui redoutent le pire et préfèrent vendre avant la publication des résultats.

Tout a commencé avec la chute de 37 % du titre Alstom le 5 octobre, suivi le 10 octobre, entre autres par celle d’EuroApi(-59%). Dans ce cas précis, le préjudice ne concerne pas uniquement les actionnaires, mais aussi le directeur général, sommé de quitter la société à la fin du mois. Les changements de direction et de stratégie sont fréquents pour écrire une nouvelle histoire et effacer le plus rapidement possible cette douloureuse facture dans les mémoires. Par la suite, la route peut être longue pour retrouver de la confiance. 

Un climat qui ne milite pas pour la pondération actions dans les portefeuilles

Dans un tel contexte et compte tenu de l’environnement incertain, de nombreux investisseurs préfèrent regagner prématurément leur tanière hivernale, en cet automne incroyablement doux. Cela ne milite pas pour augmenter davantage la pondération en actions dans les portefeuilles, mais plutôt pour être encore plus sélectifs dans le choix des valeurs.

Les interrogations pleuvent :  quel sera réellement le niveau des bénéfices pour 2023 et pour 2024 ? La baisse des indices rend les valorisations, en théorie, plus attractives.

Une prime de risque supplémentaire

Mais face à toutes ces incertitudes, le marché demande une prime de risque supplémentaire, pour pallier une probabilité plus forte de déconvenues. Pourtant, tous ces excès de ventes créent des opportunités pour ceux qui investissent sur le long terme, connaissent bien les sociétés et peuvent détecter de bonnes affaires.

Retenons les bons élèves, comme Hermes International qui affiche une croissance organique de 15,6 %, et qui reste une exception dans le luxe. Ce secteur a connu une nette décélération généralisée, touchant beaucoup d’acteurs, tels que LVMH et surtout Kering en décroissance organique de 9 %, avec Gucci en tant que marque prestigieuse en totale perte de vitesse.

Nous favorisons les Etats-Unis face à l’Europe

Finissons cet édito par une note positive, avec la croissance américaine estimée à 4,9 % au troisième trimestre contre 4,5 % comme attendue et 2,1 % précédemment. Cela nous renforce dans notre choix de favoriser les États-Unis au détriment de l’Europe. 

Oil en stock

Le monde entier retient son souffle et le bilan humain s’alourdit quotidiennement au Moyen-Orient. Les tentatives diplomatiques échouent. Elles ne réussissent qu’à trouver des solutions humanitaires bienvenues, mais qui restent dérisoires pour la population civile concernée.

Hausse des cours de l’énergie

Le fait inédit depuis plus de 40 ans est que ce nouveau conflit israélo-palestinien fait grimper les cours de l’énergie. En théorie, la zone de combats est pauvre en pétrole et ne devrait pas influencer le prix des matières premières fossiles.

La réalité est toute autre. En effet, l’implication de l’Iran en tant que soutien du Hamas et du Hezbollah fait craindre une extension mondiale de cette guerre. 

Sommes-nous à la veille d’un nouveau choc pétrolier ?

Seuls les plus de 50 ans s’en souviennent. En 1973, à la suite de la guerre du Kippour contre Israël, les pays producteurs de l’OPEP décidèrent en rétorsion d’augmenter fortement le prix du baril de brut. Celui-ci passa de 2,60 dollars en octobre à plus de 11 dollars en janvier 1974.

Cinq années plus tard, c’est à cause de la révolution iranienne de 1979, que le cours de l’or noir connut un pic à 40 dollars. Nul doute que l’appel de cette semaine de l’Iran à boycotter Israël fait resurgir ce scénario de cauchemar pour les pays consommateurs. 

Un marché actuellement en déficit

Il faut reconnaître qu’avant l’attaque du 7 octobre, le cours du Brent était dans un canal entre 80 à 90 dollars, à cause des coupes de production décidées par l’OPEP+. Cette stratégie, menée par l’Arabie Saoudite, a permis de faire baisser les stocks de brut.

Selon l’Agence Internationale de l’Énergie, les stocks des pays de l’OCDE totalisent 2,816 milliards de barils. Ces stocks sont passés en juin dernier en dessous des niveaux de 2022 et représentent l’équivalent de 58 jours des besoins nécessaires.

Ils sont dorénavant inférieurs à la moyenne des 5 dernières années de 102 millions de barils. Si l’offre a été contenue à 101,6 millions de barils jours en septembre, la demande mondiale a augmenté de 2,3 millions de barils en 2023 pour atteindre 101,9 millions de barils jour. 77 % de cette progression provient de la Chine, de l’Inde et du Brésil. Le marché est donc actuellement en déficit. Selon les estimations de Kepler Cheuvreux, ce déséquilibre atteindrait même 2 millions de baril jour au 4ème trimestre.

L’importance géopolitique dans la production de pétrole

Avant le conflit, l’Arabie Saoudite avait initié les démarches en vue d’une reconnaissance de l’État Hébreux. Ce processus est désormais gelé. L’Iran a produit 3,14 millions de barils par jour en septembre contre 9 millions pour le royaume saoudien. Les capacités disponibles de l’OPEP sont évaluées à 4,91 millions de baril jour dont 3,13 millions pour les Saoudiens et 0,95 millions pour les Émirats Arabes Unis. On voit bien l’importance géopolitique de ces pays actuellement. Pendant les dernières guerres du Golf, l’Arabie saoudite veillait à ce que le marché mondial de pétrole ne soit pas en situation de pénurie. Qu’en est-il aujourd’hui où le Premier ministre Mohammed ben Salmane affiche beaucoup moins d’affinité avec les États-Unis que ses prédécesseurs ?

Le brut et l’or : des valeurs refuges

Toutes ces interrogations et ces inconnues expliquent la bonne tenue des cours du brut, et de l’or en tant que valeur refuge. Cela renforce notre conviction de maintenir notre surpondération sur les valeurs pétrolières dans nos portefeuilles. Cependant, toutes les matières premières fossiles ne sont pas en surchauffe. Ainsi, le prix du gaz naturel TTF en Europe se situe aux alentours de 50 euros le mégawattheure, contre 100 euros l’année dernière. L’explication se trouve dans la consommation, en baisse de 18 % sur un an et le niveau des stocks, à 98 % des capacités dans l’Hexagone, selon DataGaz. Même si le conflit a fait bondir le prix du gaz de 40 %, ce sont principalement les températures qui décideront des cours ces prochaines semaines.

LVMH cale au 3ème trimestre

C’était la publication attendue en ce début de saison des résultats, en tant que baromètre du secteur.

Les résultats de LVMH ont déçu

Notre champion français du Luxe, leader mondial incontesté, a annoncé son chiffre d’affaires du troisième trimestre ce mardi 10 octobre, après la clôture du marché. Celui-ci a déçu et est ressorti à 19,96 milliards d’euros, contre des attentes aux alentours de 21 milliards d’euros. La réaction du titre ne s’est pas fait attendre, avec une baisse de 6,46% au cours de la séance du lendemain. La division Vins & Spiritueux est la plus décevante avec une baisse de 21,5% du chiffre d’affaires en euros.

La branche distribution sélection a toutefois progressé

À l’inverse, la branche Distribution sélective a agréablement surpris, avec une progression de 17,6% de ses revenus. LVMH ayant connu, depuis 2010, un accroissement annualisé de plus de 12% de ses revenus et de plus de 15% de son bénéfice par action. C’est pourquoi  la donnée clé scrutée par les investisseurs est la croissance organique du groupe, ainsi que celle de chaque entité. L’année 2023 avait bien débuté, car celle-ci était de 17% au premier semestre. La déception se lisait sur tous les visages avec le chiffre de 9% au troisième trimestre contre 11,9% attendu par les analystes.

Ralentissement de la division Mode et Maroquinerie

La division Mode et Maroquinerie, considérée comme le navire amiral et qui pèse près de la moitié des ventes, affiche également un net ralentissement avec une croissance de 9% contre 20% au premier semestre et 11,2% attendu par le consensus. 

Est-ce la fin de la super croissance et un retour à une normalisation ?  

En 2022, LVMH avait publié également une croissance organique magnifique de 17%, qui s’était poursuivie au 1er semestre 2023. Cette superbe performance a été possible, malgré un 4ème trimestre 2022 plus modéré à 9%. Par conséquent, des trous d’airs dans le passé, comme nous le vivons aujourd’hui, ne constituent pas un fait nouveau et n’ont pas entamé le potentiel du groupe.

La dichotomie entre les divisions est un phénomène plus rare

Ce qui est plus rare, est la forte dichotomie entre les divisions, comme nous l’évoquions auparavant. Nous pouvons donc penser, que dans une configuration où toutes les entités contribuent positivement, la croissance potentielle du groupe se situe nettement au-dessus des 10%. Un autre point important est la faiblesse actuelle aux États-Unis, qui connaissent une progression de seulement 2%, après une contraction de 1% précédemment. Etant donné les récents bons chiffres économiques et le niveau faible du chômage outre-Atlantique, il est légitime de penser que l’activité devrait redémarrer, surtout si l’effet de déstockage dans la branche Vins & Spiritueux, principalement dans le cognac, cesse. 

L’atout majeur de LVMH ? Son « pricing power »

L’atout majeur du groupe reste son « pricing power », c’est-à-dire sa faculté à augmenter ses prix, car la demande sur ses produits de luxe est inélastique et peu sensible à la conjoncture économique. Nous pensons que ce sera toujours le cas, à part quelques exceptions dans les vins et spiritueux. LVMH ne communique pas dans ses publications, sur la contribution de l’effet prix dans son chiffre d’affaires, mais celui-ci doit être significatif. C’est pour cela que le consensus des analystes de 24,17 milliards d’euros de revenus pour ce 4ème trimestre contre 22,7 milliards d’euros l’année dernière semble atteignable, surtout dans un contexte d’achats de fêtes de fin d’année. Tout ceci serait possible, malgré un effet de change défavorable de 4% sur les neufs premiers mois et probablement plus important au cours du dernier trimestre, et qui devrait se poursuivre au cours de ces trois derniers mois de l’année. 

Une opportunité d’investissement

En résumé, LVMH reste une société de croissance, dont le potentiel organique à long terme se situe toujours entre 10 et 15% par an. Après une déception, et dans un contexte géopolitique plus compliqué comme aujourd’hui, la faiblesse du titre pourrait durer encore plusieurs semaines, mais devrait constituer, selon nous, une opportunité d’investissement  à moyen et long-terme.

En attendant la saison des résultats

La hausse des taux longs continue à comprimer les multiples de valorisation

Le taux souverain américain à 30 ans a atteint, provisoirement le 4 octobre, le seuil symbolique de 5%. Cet indicateur est très important outre-Atlantique, car il sert de référence pour le calcul des emprunts immobiliers (le fameux « Mortgage rate » à 30 ans), qui a atteint un pic à 7,88%.

Cette brutale augmentation du loyer de l’argent fait pression sur les prix des logements. C’est également le cas en France où le taux ordinaire à 25 ans se situe désormais aux alentours de 4,40%. Selon les prévisions de Century 21, la baisse des prix de l’immobilier dans l’Hexagone devrait se situer entre 5 et 7% en 2023.

Phénomène de compression identique sur les actions

Ce phénomène de compression est identique sur les actions et se mesure avec le ratio cours sur bénéfice par action (« Price to Earnings Ratio » ou PER). La seule différence est qu’il a commencé bien plus tôt (depuis fin 2020), et s’est produit en deux phases.

Baisse du ratio cours sur bénéfice des entreprises de l’indice STOXX Europe 600

La première a duré jusqu’en octobre 2022 et la seconde a débuté en mars 2023 et s’accélère depuis septembre, avec la brutale remontée des taux longs.  Au cours de cette période de presque 3 ans, le ratio cours sur bénéfice par action des entreprises européennes de l’indice STOXX Europe 600 est passé de 21,3 à 12,08 aujourd’hui. Fort heureusement, cette baisse de 43% ne coïncide pas avec une chute de l’indice, car les bénéfices par action ont plus que doublé depuis l’année 2020, qui correspondait à un point bas à cause de la pandémie.  

Double peine en 2022

Les investisseurs sont plus ou moins sensibles à ce mouvement, selon la dynamique des bénéfices. Ainsi, l’année 2022 a été synonyme de grand stress, car les taux longs se sont fortement tendus en Europe, selon le 10 ans allemand (passant de -0,17% à +2,57%,), en même temps que planaient de grandes incertitudes sur les bénéfices, avec l’invasion de l’Ukraine. Cette double peine a contribué à une chute de 19% de l’indice STOXX Europe 600 dividendes réinvestis à fin septembre, avant une nette reprise dans le sillage d’une accalmie sur les taux et d’une nette révision à la hausse des bénéfices, grâce à une forte augmentation des marges.

Et maintenant ?

Pour que les flux reviennent enfin en Europe, il faut à la fois une stabilisation du marché obligataire et une visibilité sur les profits des entreprises. L’accalmie sur le marché obligataire viendra d’une moindre tension sur le marché du travail et de la poursuite de la désinflation. La baisse du nombre de créations d’emplois en septembre aux États-Unis à 89 000 contre 180 000, le mois précédent selon l’ADP a provoqué un soulagement depuis mardi. Celle-ci devra être confirmée cet après-midi par les chiffres du chômage publiés par le bureau du département du travail.

La baisse de l’inflation devrait se poursuivre

En outre, la baisse de 10% des cours du pétrole sur la semaine, après une nette tension en septembre, permet de croire que la baisse de l’inflation devrait se poursuivre, mais à un rythme trop lent pour les banques centrales. Ces institutions devront donc rassurer au cours de leurs prochaines réunion du 26 octobre (BCE) et du 1er novembre (FED). Reste donc l’inconnue sur les bénéfices des entreprises, dans un contexte de ralentissement en Europe et en Chine et la fin d’une brutale remontée de prix de vente.

L’inconnue reste les bénéfices des entreprises

Les investisseurs sont donc très sensibles sur le sujet, comme le démontre la chute de 37,6% du titre Alstom sur une révision négative de free cash-flows pour 2023. Fort heureusement sa pondération dans l’indice était modeste (0,43%) et a eu peu d’impact sur l’indice français. La balle est donc dans le camp des poids lourds de la cote, qui devront convaincre. La semaine prochaine, nous aurons la publication des ventes du troisième trimestre de LVMH. Cela constitue un évènement important pour une remontée à court terme des actions. Plus que jamais, nous privilégions la sélectivité dans le choix des valeurs, car les déceptions peuvent se payer très cher.

Un vent de renouveau avec des taux plus hauts

L’envolée des taux amorcée depuis le début de l’année 2022 est sans précédent. En effet, afin de faire face à une inflation vigoureuse et persistante, les banques centrales mondiales ont dû remonter de façon importante leurs taux directeurs au cours de ces deux dernières années.

Impact favorable sur les rendements des obligations

L’effet escompté s’est fait ressentir, même si le récent rebond des cours du pétrole pourrait ralentir la tendance baissière observée sur l’inflation. Pour autant, cela a eu un impact favorable sur les rendements des obligations, qui retrouvent des couleurs et offrent désormais des opportunités d’investissements.

Comme nous l’avions également évoqué lors de notre dernier édito, le taux à 10 ans de l’emprunt d’état allemand a renoué avec les niveaux observés en 2011, tandis que son homologue américain fleurte désormais avec ceux de 2007. De fait, ce constat doit attirer le regard sur les rendements obligataires.

Attrait renforcé des dettes privées

Intéressons-nous maintenant de plus près aux dettes privées. En effet, leur attrait se trouve renforcé dans la mesure où cette classe d’actifs offre de manière générale un surplus de rendement par rapport aux emprunts d’états, qui rémunère le détenteur pour le risque encouru. On distingue les dettes les mieux notées, que l’on classe en catégorie investment grade et les dettes dites à haut rendement (« high yield » ou spéculatives), qui sont, certes, moins bien notées mais qui offrent là aussi une prime intéressante pour les détenir.

Aujourd’hui, l’univers crédit européen investment grade offre un rendement moyen de 4,6 %, alors que l’univers crédit européen spéculatif propose une rémunération autour de 7,6 %. Ces rendements, que nous n’avions plus vus depuis de nombreuses années, nous incitent à revenir plus que jamais sur la classe d’actif obligataire.

Quelle allocation obligataire privilégier dans l’environnement actuel ?

 Compte tenu des éléments exposés précédemment, il nous semble judicieux sur un horizon d’investissement de 5 ans, d’avoir une allocation crédit à 70 % sur de la dette privée investment grade et à 30 % sur de la dette privée à haut rendement. Pourquoi cela ?

Bénéficier du meilleur des deux mondes

L’idée est de bénéficier du meilleur des deux mondes :

  • D’un côté, s’assurer d’un socle de rendement confortable sur des obligations bien notées dont la qualité de crédit assure une bonne visibilité sur les performances à horizon moyen terme. Par ailleurs, contrairement aux obligations à haut rendement, la duration moyenne de ces titres est plus élevée, autour de 4,5 années. Dans la mesure où nous pensons que le cycle de hausses des taux de la part des banques centrales américaine et européenne touche bientôt à sa fin, l’univers crédit investment grade bénéficiera de toute baisse de taux qui pourrait survenir à compter de ce jour. C’est la raison pour laquelle nous allouons 70 % à cette poche. 
  • D’un autre côté, dédier une part plus raisonnable, autour de 30 %, à l’univers crédit européen à haut rendement, afin de limiter le risque de défaut en portefeuille, jugé trop important selon nous dans une solution 100 % spéculative, tout en accroissant de façon non négligeable le rendement proposé par notre solution. Cet univers est par ailleurs moins exposé aux mouvements des taux dans la mesure où sa duration s’établit autour de 2,9 années.

Ainsi, avec la hausse des taux vient le temps du renouveau : l’heure est venue de se repositionner avec conviction sur le segment obligataire.

Pas de récession en vue selon la Fed

Décidément, les banquiers centraux se font un malin plaisir de nous surprendre depuis une semaine ! Contrairement à la BCE, qui a étonné en augmentant ses taux directeurs, tout en adoptant un discours accommodant, la Fed a déçu en marquant une pause, et avec des prévisions plutôt restrictives. Analysons le bon et le mauvais des dernières données fournies par l’institution américaine.

Scénario de « soft landing« 

Selon la médiane des dernières projections de ses membres, la croissance du PIB a été fortement révisée à la hausse, par rapport à juin, à 2,1 % contre 1 % en 2023 et à 1,5 % contre 1,1 % en 2024. Parallèlement, les anticipations du taux de chômage ont été abaissées à 3,8 % contre 4,1 % en 2023 et à 4,1 % contre 4,5 % en 2024.

En d’autres termes, la Fed est en train de nous dire qu’elle ne voit plus de récession imminente, ou alors au pire, un faible ralentissement sur quelques mois, insuffisant pour être qualifié comme telle. De plus, si on se fie aux propos de son président lors de la conférence de presse, le scénario de « soft landing », en anglais, laisserait place à une économie solide et en croissance.

Tout ceci est plutôt positif, en théorie, car bon pour les volumes et donc les profits des entreprises. Un autre élément satisfaisant concerne l’inflation qui, certes, a été modérément révisée à la hausse en 2023 et inchangée pour 2024 pour l’indice nominal (soit respectivement à 3,3 % contre 3,2 % et à 2,5 % inchangé), mais abaissée pour l’indice dit de base (hors énergie et alimentation) à 3,7 % contre   3,9 % en 2023 et inchangé en 2024. Par conséquent. la désinflation n’est pas terminée. 

Pourquoi les actions et les obligations baissent ?    

Parce que les taux directeurs anticipés par la Fed ont évolué à la hausse pour fin 2024 (5,1 % contre 4,6 % en juin). Ce niveau est toujours supérieur à celui des taux longs à 10 ans actuels aux États-Unis, qui se sont nettement tendus et ont touché un point haut depuis septembre 2007 à 4,49 %.

De surcroît, la Fed n’exclut pas d’ajuster ces prévisions, à la hausse comme à la baisse, selon l’évolution des données économiques. On assiste donc à une pentification de la courbe des emprunts obligataires, avec une remontée des maturités longues. Celle-ci est donc moins inversée et pénalise la valorisation des emprunts d’États et des entreprises, ainsi que celles des actifs risqués donc les actions, surtout celles chèrement valorisées. La baisse de 3,26 % de l’indice Nasdaq 100 depuis le communiqué de la Fed,  comparée à celle de 1,87 % de l’indice Dow Jones, en est l’illustration.

Quels changements faut-il adopter dans les portefeuilles ?  

Restons pragmatiques. Dans le cas où l’activité économique est plus robuste que prévu outre-Atlantique, couplée avec une pentification de la courbe, il convient de renforcer des valeurs plus sensibles au cycle économiques. L’exemple de FedEx, dont le titre s’est adjugé plus de 4,5% au cours d’une séance fortement négative, mérite que l’on s’y attarde.

La société vient de relever ses prévisions annuelles après un trimestre excellent. Elle a toutefois conservé un message prudent sur l’environnement macroéconomique, mais a également bénéficié d’une baisse de 2 % de sa base de coûts. La belle réaction du titre s’explique par le fait que les investisseurs sont sous-exposés sur ce type de valeurs et probablement trop exposés aux valeurs de croissance aux États-Unis.

D’autres belles surprises sont donc à prévoir sur ce premier segment de la cote. En revanche, compte tenu de la faiblesse des données économiques en Europe, nous ne sommes pas prêts de faire ce type d’arbitrage et préférons toujours une approche défensive et maintenons nos valeurs de croissance, raisonnablement valorisées, au détriment de valeurs cycliques, à l’exception de celles bénéficiant de la transition écologique. La dichotomie entre les deux zones implique une stratégie différente par chaque zone géographique. 

Pas de changement de scénario

La BCE relève ses taux directeurs à 4%

C’était quasiment inattendu. La BCE vient de relever ses taux directeurs une dixième fois depuis juillet 2022, les portant ainsi à 4 %. Cette action a été une surprise pour la majorité d’entre nous, puisque le marché estimait cette probabilité à 40 %. Pour autant, la réaction des investisseurs n’a pas été négative, puisque les taux longs et l’euro ont baissé et les indices actions ont grimpé.

L’inflation restera élevée encore longtemps

Dans son communiqué, la BCE annonçait avoir révisé à la hausse ses estimations d’inflation pour 2023 et 2024 (respectivement à 5,6 % et 3,2 %) et à la baisse ses prévisions de croissance pour 2023, 2024 et 2025 (respectivement à 0,7 %, 1 % et 1,5 %). Lors de sa conférence de presse, Christine Lagarde a répété plusieurs fois que l’inflation restera pour longtemps trop élevée. De facto, la politique restrictive actuelle sera maintenue pour une période prolongée, afin de ralentir suffisamment l’activité et que la hausse des prix retrouve son objectif à moyen terme de 2 %. Le paragraphe sur l’état actuel de l’économie indique clairement que la croissance devrait rester extrêmement faible ces prochains mois, après une stagnation au 1er semestre et des chiffres toujours médiocres au 3èmetrimestre. 

Alors, pourquoi vivons-nous une réaction positive des marchés actions avec des prévisions économiques si moroses ? 

Il y a plusieurs raisons à cela. Tout d’abord, c’est l’inflation nominale qui a été révisée à la hausse, alors que celle de base (hors énergie et alimentation) a été revue à la baisse à 5,1 % en 2023, 2,9 % en 2024 et  2,2 % en 2025. Ensuite, il a été également précisé, que les taux actuels, maintenus pour une durée suffisamment longue, avaient atteint un niveau suffisant, afin que ceux-ci contribuent substantiellement à un retour de l’inflation à l’objectif souhaité. Les investisseurs ont donc interprété cette phrase comme étant la fin du plus dur cycle de hausse de taux de l’histoire de l’institution européenne.

Enfin, Christine Lagarde n’a pas oublié de mentionner qu’à terme, le dynamisme économique devrait redémarrer, dans un contexte favorable pour l’emploi, avec un regain du pouvoir d’achat des ménages et une augmentation de la consommation.

Les investisseurs ont fait preuve de prudence

La dernière explication est technique. Les investisseurs ont fait preuve de prudence avant cet évènement, qui correspondait à la veille de l’échéance des dérivés et de la fameuse journée dite des « 4 sorcières ». Ils ont débouclé leurs positions sur septembre dans l’après-midi et, rassurés, n’ont pas renouvelé intégralement leurs couvertures sur l’échéance suivante.

Et un rééquilibrage des indices boursiers

À cela, s’ajoute un rééquilibrage des indices boursiers ce vendredi. Selon BNP Paribas, celui-ci devrait s’élever à plus de 7,5 milliards de dollars, dont 1,5 milliards de flux positifs pour les valeurs françaises et italiennes. De plus, les valeurs de croissance avaient corrigé depuis plusieurs semaines,, notamment celles du luxe. L’incertitude passée, des achats à bon compte ont été effectués.Maintenant, la balle est dans le camp de la Fed, qui devra réussir le même exercice lors de sa prochaine réunion ce mercredi 20 septembre. Certes, la fin d’un cycle de durcissement monétaire est traditionnellement une période plus favorable pour les marchés.

Une stabilité du marché obligataire est toujours la bienvenue pour la stabilité des actifs financiers. Cependant, le scénario central n’est pas, selon nous, modifié : une croissance faible et des taux à 2 ans tendus, qui pèseront davantage sur le refinancement des entreprises en 2024.

D’où une sélectivité importante toujours de mise. D’ailleurs, les anticipations des taux directeurs de la BCE pour le printemps 2024 ont très peu évolué. La hausse d’hier était juste anticipée sur le calendrier des investisseurs, qui l’avaient programmé avant la fin de l’année.