La ruée vers le vert : les investisseurs voient la vie en couleur

En 2025, les investisseurs se sont précipités pour profiter de la hausse de l’or jaune. Mais il existe une autre couleur qui, étonnamment, se porte encore mieux : le vert. Autrement dit les actions liées à l’énergie propre.

Les valeurs de la transition énergétique se sont hissées tout en haut du podium.  Depuis les annonces tarifaires de la Maison Blanche début avril, leur indice mondial (le S&P Global Clean Energy Transition Index) a bondi d’environ 40 %. Quand l’or et l’indice S&P 500 se contentaient d’une progression respective d’environ 30 % et 20 %.

Pour couronner le tout, l’indice se négocie sur la base d’un ratio cours/bénéfices 2025 inférieur à celui de l’indice élargi (21.3x contre 25x). Ce qui laisse présager un joli potentiel de rattrapage. Ce contraste montre qu’un portefeuille à thématique durable peut conjuguer éthique et performance, et l’éclat métallique de l’or fait pâle figure à côté de cet élan vert.

Comme souvent en bourse, quand une couleur domine, une autre tente déjà de lui voler la lumière. Cette semaine, la flambée de l’argent blanc, qui a franchi la barre symbolique des 50 dollars, rappelle que l’appétit des investisseurs dépasse la simple couverture contre l’inflation. C’est une ruée portée par l’instinct, par ces « animal spirits » chers à Keynes. Cette envolée argentée, plus rapide encore que celle de l’or, illustre combien la recherche de refuge vire parfois à la quête de momentum.

Pour en revenir au vert, la performance est d’autant plus étonnante que le climat politique n’a rien de favorable. L’administration américaine a mis des bâtons dans les pales. En effet, son One Big Beautiful Bill Act (« OBBBA ») a accéléré la suppression des crédits d’impôt pour l’éolien, le solaire et les véhicules électriques.

En parallèle, des milliards de dollars de projets ont été annulés, des permis ont été gelés et les incitations fédérales sabrées. Au lieu de plonger le secteur dans l’obscurité, cette rafale a permis aux acteurs de se recentrer et de clarifier les règles du jeu. Certains segments, comme la géothermie, le nucléaire et la capture du carbone, ont même été épargnés par les coupes et pourraient profiter de cette attention nouvelle.

Pendant que Washington souffle le chaud et le froid, Pékin orchestre une « anti-involution ». C’est un programme destiné à freiner la compétition stérile où des ressources sont investies sans augmenter les rendements. Face à une surcapacité chronique et à une guerre des prix destructrice, l’agence nationale de l’énergie chinoise impose la rentabilité et la qualité. Les prix du polysilicium se redressent, les valeurs solaires rebondissent et des sociétés comme Goldwind ou Bloom Energy affichent des gains à trois chiffres depuis avril. Ce coup de baguette rappelle que la Chine n’est pas seulement un marché gigantesque : elle peut, en un décret, modifier le rythme de la transition énergétique mondiale.

La soif d’électricité liée aux centres de données et à l’intelligence artificielle pourrait doubler la consommation d’ici 2028. Créant une demande inédite pour une énergie bas carbone abondante. La baisse des taux d’intérêt facilite le financement de nouvelles infrastructures. La régulation chinoise, qui lutte contre la surcapacité, améliore les marges. Tandis que plusieurs États américains renforcent leurs propres programmes et que l’Europe, l’Inde et la Chine poursuivent leurs ambitions bas carbone. Ajoutons que les segments épargnés par le fameux OBBBA – géothermie, nucléaire et capture du carbone – offrent de nouveaux relais de croissance. Ce cocktail explique pourquoi l’indice vert surperforme aussi l’indice mondial du pétrole et la plupart des marchés. Et pourquoi les fonds spécialisés continuent de lever des capitaux, persuadés que la demande faiblement carbonée restera durable.

L’hostilité de la Maison Blanche a forcé les acteurs à se structurer. Elle leur a, paradoxalement, aussi apporté de la visibilité. En Asie, la lutte contre la surproduction et l’essor de l’intelligence artificielle donnent un nouveau souffle aux valeurs propres.

Même si la volatilité subsiste et que le secteur se négocie encore à la moitié de son pic de 2021, il est devenu incontournable. De quoi rappeler qu’en bourse aussi, le vert peut valoir de l’or. Un changement de couleur dans son portefeuille peut transformer un simple lingot en véritable pépite de croissance.

Ce n’est pas une injonction à se ruer aveuglément sur n’importe quel titre, mais un rappel que la diversification colorée peut se révéler payante. En attendant, on peut refermer son ordinateur, profiter du week-end et, entre deux cafés, méditer sur cette leçon. Parfois, la meilleure façon de briller est de penser… vert.

50 dollars. Le seuil symbolique dépassé pour une once d’argent.

3 milliards d’euros. Le montant du plan d’incitations, adopté par la coalition allemande, visant à soutenir l’achat de véhicules zéro émission.

Europe : panne de croissance et marchés trop complaisants

[🎥 Vidéo en partenariat avec Tout pour Investir – L’Événement]

La valorisation des marchés européens est-elle extravagante ? Quels secteurs restent porteurs ? Période de publication : bonnes ou mauvaises surprises en l’absence de visibilité ?

🎙️ Amandine GERARD partage son analyse dans une interview exclusive menée par Antoine Larigaudrie (BFM Business) pour Tout pour Investir l’événement.

Une discussion à suivre pour :
🔍 comprendre la dynamique actuelle des marchés,
📉 anticiper les risques,
📈 et saisir les opportunités à venir.

👉 Regardez la vidéo



📅 Retrouvez les équipes de Financière de l’Arc le 20 novembre prochain au Pavillon d’Armenonville à Paris, à l’occasion de Tout pour Investir – L’Événement.

« Instabilité politique, dette souveraine, accord Pfizer : la réaction des marchés »

Amandine GERARD était l’invitée de Guillaume SOMMERER sur le plateau de BFM Business aux côtés d’Alexandre Baradez (IG) et John Plassard (Cité Gestion) pour décrypter l’impact de l’actualité politique et économique sur les marchés financiers.
Ils ont également abordé l’accord entre Pfizer et les États-Unis, et les conséquences possibles sur les prix des médicaments en Europe.

Un échange riche et sans détour sur la situation française, les banques en première ligne et les signaux à surveiller dans les semaines à venir.

🎥 À (re)voir ici 👉 Visionner la vidéo

Flambée de la pharma et hausse des prix des nouveaux médicaments en Europe

« Les États-Unis ne subventionneront plus les soins de santé du reste du monde ». « Mon administration a également pris des mesures historiques pour enquêter sur les pratiques commerciales injustes et discriminatoires d’autres pays. Qui extorquent nos fabricants de produits pharmaceutiques afin de faire porter les coûts sur le consommateur américain ».

Ces phrases – prononcées par Donald Trump dans le Bureau ovale lors de la conférence de presse du 30 septembre – sont sans équivoque. Le prix des nouveaux médicaments, qui seront prochainement commercialisés en dehors des États-Unis — et plus précisément dans les autres pays riches de l’OCDE — va augmenter.

Tandis que celui observé au pays de l’Oncle Sam va baisser.

En effet, l’accord qui vient d’être signé avec Pfizer va bien au-delà d’un simple contrat entre un fabricant et une administration. Tous les termes de cet engagement mutuel, dont le détail est resté volontairement confidentiel, constitueront un précédent. Non seulement pour l’industrie, mais également pour les systèmes de sécurité sociale du monde entier.

Le marché l’a bien compris. Il a salué cet évènement par des hausses de cours de plus de 10% en une seule séance pour certains titres, comme celui d’AstraZeneca (+11,21 %).

Et quelles en seront les principales conséquences pour tous les acteurs, y compris pour nous en tant qu’assurés européens ?

Imaginez une nouvelle plateforme digitale de la Sécurité sociale française baptisée MacronRx ! Eh bien, c’est possible aux États-Unis ! Et pas si étonnant sous la présidence actuelle.

Ce nouveau site internet, géré par le gouvernement fédéral devrait être opérationnel dès le 1er janvier prochain. Il proposera à la vente la plupart des médicaments de Pfizer. Ceux vendus dans le programme MedicAid (l’assurance santé pour les plus démunis aux États-Unis). Avec des remises de 50 à 85 % sur le prix catalogue facturé par les mutuelles et les gestionnaires des programmes de santé.

De surcroît, ces traitements seront également accessibles à tout le monde. Y compris aux assurés de Medicare ou de mutuelles privées. Même si les conditions de remboursement pour ces deux catégories de bénéficiaires ne sont pas évoquées – car inconnues – il s’agit d’un moyen de pression pour rogner la marge du détesté «homme du milieu», surnom donné aux fameux PBM (Pharmacy Benefit Managers). En effet, ces derniers récupèrent une partie très importante des remises octroyées par les laboratoires.

Désormais, le prix des nouveaux médicaments sera aligné pour tous les canaux de distribution outre-Atlantique (vente libre, MedicAid, Medicare et mutuelles privées) à celui observé dans les autres pays de l’OCDE.

Cette clause vise à respecter le décret signé le 12 mai dernier. Chèr au Président, il porte sur la notion dite de MFN (Most-Favored-Nation).

Fin juillet, Donald Trump avait adressé une lettre à 17 laboratoires pharmaceutiques. Il leur a donné deux mois pour aligner le prix des médicaments sur le territoire national à celui du plus bas pratiqué dans les nations dites développées. Les « heureux » élus devaient y répondre en détaillant toutes les mesures envisagées pour satisfaire à cette exigence. Pfizer, en tant que meilleur élève américain a, semble-t-il, coché toutes les cases en concluant cet accord le premier.

Chris Klomp, l’actuel directeur de Medicare, a donné les grands principes du fonctionnement de cette clause « MFN » lors de la conférence de presse. Le plus important est celui d’équité. Plutôt que d’être contraint de s’aligner sur le prix le plus bas observé dans tous les pays de l’OCDE, Pfizer sera libre de facturer le prix de ses nouveaux médicaments. Ceci lui permettra de dégager les profits nécessaires pour augmenter ses investissements en R&D et en capacités de production aux États-Unis. 

La firme de New York s’est engagée sur une enveloppe de 70 milliards de dollars au cours des prochaines années. En échange, elle bénéficiera d’une exemption totale sur les droits de douane pour les trois prochaines années.

La réponse est multiple. Tout d’abord, la clause MFN négociée concerne uniquement le prix des nouveaux médicaments. C’est un énorme soulagement. En effet, les investisseurs redoutaient, après la signature du décret du 12 mai, que son application soit étendue à l’ensemble des molécules de marque commercialisées sur le territoire.

Dans les faits, Pfizer restera le premier à avoir volontairement lâché du lest pour se voir octroyer de sérieuses contreparties. Comme beaucoup d’acteurs, son exposition au programme Medicaid est réduite. Si l’on se réfère au rapport annuel 2024, le montant des remises octroyées à Medicare s’est élevé à 2,25 Md$. En se basant sur une remise globale de 50 %, le chiffre d’affaires de Pfizer dans Medicaid s’élèverait à environ 4,5 Md$. Soit autour de 7 % des revenus totaux.

Accorder des remises supplémentaires de 10 à 20 % sur cette partie ne représenterait qu’une concession minime de 0,7 % à 1,4 % sur les revenus, en échange d’exemptions. C’est plutôt bien négocié stratégiquement.

Ensuite, le secteur de la santé — et plus précisément celui de la pharmacie — était très en retard en matière de performance et de valorisation. Le ratio bénéfice par action sur le prix se traitait avec une décote de 15 à 25 % par rapport à celui du marché. Au plus bas depuis trois décennies. Depuis dix mois, le secteur de la santé est malmené par les déclarations et tweets incessants de la nouvelle administration. L’accord signé le 30 septembre donne ce qui est le plus précieux aux investisseurs : de la visibilité. Le phénomène de rattrapage ne fait que commencer, selon nous.

C’est une certitude dans le Bureau ovale : les autres groupes pharmaceutiques vont se bousculer au portillon pour trouver un terrain d’entente. L’inconnu restera les termes, et plus précisément les rabais accordés. Comme le détail reste volontairement confidentiel pour permettre une négociation serrée, il n’est pas sûr que les conditions soient les mêmes pour tout le monde. Les derniers seront-ils les moins bien lotis au bout du compte ? Ceux qui n’ont pas daigné répondre à la lettre du Président du 31 juillet devront-ils payer leur manque de coopération au prix fort ?

Les laboratoires devraient bénéficier d’une revalorisation de leur cours de bourse. Toutefois, une dichotomie va se créer selon les accords négociés. Ensuite, les groupes les moins exposés au programme Medicaid (à hauteur de 2 %, comme AstraZeneca et Roche) devraient être les plus favorisés. L’accent mis sur l’innovation et le souhait de maintenir le leadership américain redonnent de la visibilité aux fournisseurs de la santé. C’est le cas pour Lonza, Thermo Fisher Scientific, Danaher et Sartorius Stedim Biotech.

Enfin, la volonté de passer en vente directe n’est pas anodine. Elle vise à outrepasser les mutuelles privées. La pression devrait se déplacer vers elles. Une fois encore, ce sera America First. Le prix des médicaments en dehors des États-Unis va malheureusement augmenter. De nombreuses zones d’ombre subsistent concernant ce processus de revalorisation et son calendrier. Aujourd’hui, 85 % des nouvelles molécules vendues aux États-Unis ont été commercialisées soit d’abord aux États-Unis, soit en même temps que dans le reste du monde. Qu’en sera-t-il dans un processus de négociation globale ?

9 600 milliards de dollars. Le montant des transactions quotidiennes sur le marché des changes, selon la Banque des Règlements Internationaux.

 1 000 milliards de dollars. Le montant des réserves d’or au États-Unis.

11,21 %. La hausse du titre AstraZeneca le 1er octobre.

Le train de l’IA : fondamentaux solides ou exubérance irrationnelle ?

La Bourse ressemble parfois à un train prêt à quitter la gare, où les passagers se bousculent sur le quai pour ne pas le rater. Aujourd’hui, l’Intelligence Artificielle est la locomotive vedette qui tire les marchés. La peur de ne pas être du voyage se répand plus vite qu’un tweet viral.

Le fameux « FOMO » (Fear Of Missing Out) fait son grand retour, au point que certains investisseurs préfèrent monter en marche. Quitte à embarquer à n’importe quel prix. Pour les plus prudents, il devient de plus en plus difficile de rester à l’écart, sous peine de « manquer une nouvelle fois la hausse ». La frustration accumulée depuis trois ans de ne pas avoir participé à la fête à chaque communiqué de presse mentionnant l’IA est trop forte. Beaucoup capitulent désormais et prennent coûte que coûte ces TGV boursiers tractés par les nouveaux champions de cette révolution technologique.

Certes, les performances et les capitalisations boursières donnent le tournis. L’indice Bloomberg des «Sept Magnifiques» affiche une progression de plus de 246 % sur trois ans (arrêté au 25 septembre), contre 56 % pour l’indice S&P 500 excluant les valeurs des technologies de l‘information. Sans oublier les stratosphériques Nvidia, Broadcom et Meta Platforms, dont les cours ont gagné respectivement 1355 %, 665 % et 452 % sur la même période. Au-delà des pourcentages, les sept premières capitalisations boursières mondiales sont désormais toutes des géants de la tech américaine : Nvidia, Apple, Microsoft, Alphabet, Meta Platforms, Amazon et Broadcom. Leur valorisation totale donne le vertige : 20 680 milliards de dollars, soit 70 % du PIB américain de 2024. 

Un déséquilibre se creuse. Pendant que les stars de l’Intelligence Artificielle voient leurs multiples de valorisation atteindre des sommets, des pans entiers du marché — industrie, consommation, petites capitalisations — peinent à suivre. La rotation sectorielle, si elle existe, reste timide. L’argent se concentre sur une poignée de locomotives, laissant les bonnes vieilles michelines à la traîne. C’est un marché à deux vitesses, où mieux valait être dans le TGV que dans les tortillards. 

Pas si vite. Les optimistes rappellent que l’engouement IA s’appuie sur des fondamentaux solides : les profits sont bel et bien là. Depuis la grande crise financière, les bénéfices par action du secteur technologique mondial ont bondi d’environ 400 %. La moyenne des autres secteurs cumulés n’a progressé que de 25 %.

Une croissance hors norme, qui justifie en partie la prime accordée par le marché. Rappelons que les investissements annoncés par les géants du cloud, baptisés les « hyperscalers », sont sur une tendance exponentielle. Ils sont passés de 100 milliards de dollars en 2022 à plus de 500 milliards en 2027, selon le consensus Bloomberg des analystes.

Rappelons le chiffre monstrueux évoqué par Jensen Huang, dirigeant et fondateur de Nvidia : 3 000 à 4 000 milliards de dollars de dépenses cumulées en infrastructures dédiés à l’IA d’ici 2030. La vague technologique est tout sauf irréelle. Et elle nécessite des investissements massifs en réseaux, centres de données, connexions et énergie. Son utilisation se généralise également : 700 millions d’utilisateurs de ChatGPT ont été annoncés par OpenAIen août dernier. La demande est donc bien tangible.

Chaque grande révolution technologique a connu sa phase d’euphorie suivie d’une correction : chemin de fer, Internet, cryptomonnaies… L’IA ne fera sans doute pas exception. La course actuelle a déjà déclenché une guerre économique intense, marquée par des baisses de prix agressives et une multiplication de concurrents. À terme, cette pression sur les marges pourrait rogner les profits et décevoir des investisseurs ayant payé très cher pour des promesses de croissance infinie.

Probablement un peu des deux. L’essor fulgurant de l’IA rappelle les engouements d’hier, avec son lot d’exubérance irrationnelle… mais il s’appuie aussi sur des transformations bien réelles de l’économie. Si bulle il y a, elle pourrait être de courte durée. Si révolution il y a, elle continuera d’avancer même après l’éclatement éventuel des excès.

En fin de compte, le train de l’IA est lancé à pleine vitesse. Notre rôle d’investisseurs sera de garder l’équilibre : ne pas rater le convoi, certes, mais sans oublier de regarder où l’on met les pieds. Car une locomotive lancée à vive allure peut aussi manquer un aiguillage.

Pour l’heure, profitons du voyage.

20 680 milliards de dollars. La capitalisation boursière des 7 premières valeurs technologiques américaines au 25/09.

246 %. La performance sur 3 ans de l’indice Bloomberg des 7 Magnifiques au 25/09.

Ne pas lutter contre la Fed

La situation est complexe. L’équilibre reste précaire.

Ces deux phrases, extraites de la conférence de presse de Jerome Powell du mercredi 17 septembre, résument l’embarras de la Fed face à son double mandat de stabilité des prix et de plein emploi. C’est un sérieux dilemme : l’inflation reste à un niveau trop élevé (3,1 % pour l’indice CPI de base en août) et l’emploi s’est nettement dégradé ces derniers mois. Même si le taux de chômage demeure très bas.

Il fallait agir et l’institution a tranché. La Fed a abaissé ses taux directeurs de 25 points de base (0,25 %), marquant ainsi une reprise du cycle d’assouplissement monétaire, initié en septembre 2024, mais suspendu depuis décembre dernier.

Quelles sont les conséquences de cette reprise des baisses de taux pour les actifs financiers ? Comment se sont-ils comportés historiquement depuis 40 ans ? Quelles seront les données à surveiller particulièrement ces prochains mois ?

Nous sommes entrés dans un nouveau chapitre de l’histoire des marchés, déjà vécu six fois depuis les années 1980. Rassurons-nous : la performance des actions, mesurée par l’indice MSCI World trois mois après la première baisse de taux, est en moyenne positive de 2%. Mais attention, le bilan est drastiquement différent selon la situation économique. C’est-à-dire selon que les États-Unis restent en phase de ralentissement ou basculent vers la récession.

Dans le premier cas, c’est Byzance, avec une performance boursière au-delà des 10% sur un an. Dans l’autre cas, c’est la Bérézina, avec des baisses allant jusqu’à 26% au bout de trois mois, comme en 2008. En d’autres termes, l’effet bénéfique de la baisse des taux sur les actions, par effet d’actualisation, demeure plus fort que tout, tant que l’activité économique ne décroche pas. Dans quel schéma sommes-nous aujourd’hui ? Il est encore trop prématuré pour y répondre avec certitude à ce stade, et il faut donc rester en alerte permanente.

C’est actuellement le souci majeur du gouvernement, des investisseurs et donc de la Fed. Les créations d’emplois non agricoles ont fondu comme neige au soleil. 

Jerome Powell a même franchi un cap, en indiquant que la dernière donnée de 22 000 en août se situait en dessous du fameux point mort. C’est-à-dire en dessous du pivot qui fait bondir le taux de chômage. Les membres du FOMC anticipent désormais un rebond de celui-ci à 4,50% en fin d’année, contre 4,30% en août. Lors de la conférence de presse, le débat a porté également sur les jeunes diplômés. En effet, ils sont actuellement en difficultés pour trouver leur premier emploi, probablement à cause des gains d’efficacité liés à l’apport de l’intelligence artificielle.

Par conséquent, le marché va particulièrement scruter les prochaines statistiques du marché du travail. Elles seront publiées le 3 octobre prochain, et pourraient à terme raviver la crainte du fantôme de la règle de Sahm, comme ce fut le cas, à tort, avec les données de juillet 2024. Celle-ci était censée prédire une récession lorsque la moyenne du taux de chômage sur trois mois dépasse de 0,5 point son niveau le plus bas des 12 derniers mois. Ce niveau se situe actuellement à 4,60% car le point bas de référence se situe à 4,1% (octobre et décembre 2024). Les cardiaques doivent s’abstenir !

Historiquement, quand les créations d’emplois ralentissent, il en est de même pour la consommation. Or, la dynamique actuelle est tout autre. Ainsi, les ventes au détail d’août ont été en croissance de 0,6%, et de 0,7% pour le groupe de contrôle. Toutes les banques américaines qui recensent les données de leurs clients constatent une croissance des dépenses des ménages via leurs cartes de crédit. Cette tendance positive n’est pas symptomatique d’une récession. Toutefois, il convient là encore de ne pas crier victoire trop vite. En effet, les chiffres montrent une forte dichotomie entre les différents segments d’activité. Les loisirs, la restauration, ainsi que les ventes sur Internet sont en forte progression, tandis que les dépenses en ameublement sont en berne.

La réaction historique des marchés à la reprise d’un cycle d’assouplissement monétaire est difficile à cerner dans les premières semaines. Toutefois, une tendance se dessine rapidement : tous les secteurs ou valeurs endettés, censés bénéficier d’une baisse des taux, se distinguent rapidement, comme les télécommunications et les secteurs publics. La santé est également recherchée pour sa résilience. Ce classement évolue ensuite, environ six mois plus tard, en faveur des valeurs cycliques, à mesure que le scénario économique se précise. En conclusion, il convient de ne pas lutter contre la Fed et de privilégier actuellement les valeurs de croissance, les défensives, ainsi que les valeurs cycliques endettées, telles que celles du secteur immobilier.

Historiquement, les indices américains surperforment leurs homologues européens en devise locale. Le dollar baisse avec les taux et la performance des pays émergents dépasse celle des pays développés.

0,25 %. La baisse des taux directeurs de la Fed, ce 17 septembre.

3,6 %. Le taux des Fed Funds anticipé par les membres de la Fed à fin 2025.

0,6 %. La croissance des ventes au détail en août aux USA.

Quand Wall Street écoute la voix de l’Oracle

« Vous ne me connaissez pas ? Pourtant, ma fortune a dépassé temporairement celle du célébrissime Elon Musk. Je me présente, je m’appelle Larry. J’ai réussi ma vie. Je ne suis peut-être pas le plus beau, mais je suis intelligent car j’ai fondé Oracle en 1977, dont je détiens encore plus de 40%. » 

Voici comment nous pourrions synthétiser et caricaturer en quelques lignes le succès de cet individu discret, devenu pendant quelques heures l’homme le plus riche du monde. Ainsi au cours de cette séance folle du 10 septembre, le cours de l’action Oracle était en hausse de plus de 42% pour clôturer sur un gain de 35,95%. Soit une progression quotidienne de plus de 254 milliards de dollars.

C’est un nouveau record historique, qui était détenu précédemment par le titre Nvidia le 23 mai 2024 (217 milliards de dollars). Cela représente une création de richesse de plus de 103 milliards de dollars pour l’actionnaire principal de cette société. Celui-ci trône désormais au 2ème rang de l’indice des milliardaires Bloomberg. Juste derrière Elon Musk et loin devant le 3ème qui n’est autre que Mark Zuckerberg…

Le moins que l’on puisse dire est que le jeune Lawrence Spellman, alias Larry, naquît en août 1944 d’une mère célibataire de 19 ans, dans un milieu défavorisé du Bronx de New-York. Après une pneumonie, il est confié à l’âge de 9 ans à une de ses tantes vivant à Chicago et se voit adopté par son oncle Louis Ellison. L’enfant, puis le jeune adulte, fera toute sa scolarité dans cette ville. Il ne fut même pas diplômé de l’université, car il ne se présenta pas à ses examens. 

C’est en Californie, à l’âge de 22 ans, qu’il découvrit l’informatique. Il deviendra programmeur dans plusieurs sociétés, dont Ampex. Avec deux collègues, Bob Miner et Ed Oates, ils fondèrent en 1977 la société Software Development Laboratories (SDL). Qui deviendra plus tard Oracle Corporation. L’aventure a donc commencé !

Oracle est aujourd‘hui l’un des piliers de l’informatique mondiale. Ses technologies se trouvent derrière une multitude d’activités quotidiennes : de la gestion des comptes bancaires aux dossiers médicaux, en passant par les réservations aériennes.

Son cœur de métier, ce sont les bases de données. Imaginez un immense classeur numérique capable de stocker et d’organiser des milliards d’informations. C’est ce qu’Oracle vend depuis ses débuts.

Grâce à ce savoir-faire, l’entreprise est devenue un fournisseur incontournable pour les banques, les assureurs ou les administrations. Mais la société, désormais basée à Austin au Texas, ne s’est pas arrêtée là. 

Avec l’essor du cloud, Oracle s’est positionné face aux géants comme Amazon (AWS) ou Microsoft (Azure). Concrètement, au lieu d’acheter et d’entretenir des salles entières de serveurs, les entreprises peuvent désormais acquérir cette puissance informatique à distance. Comme nous possédons un abonnement d’électricité. Cette formule séduit de plus en plus : elle permet de s’adapter rapidement aux besoins, de réduire les coûts fixes et de profiter d’une technologie toujours à jour. Oracle mise gros sur cette transformation, en développant ses propres centres de données à travers le monde et en enrichissant son offre de services.

L’idée est simple : convaincre ses clients historiques, déjà utilisateurs des bases de données Oracle, de basculer sur son cloud plutôt que ceux d’Amazon ou Microsoft.

Oracle ne s’est pas contenté de gérer des bases de données. Au fil du temps, grâce à une série d’acquisitions stratégiques, l’entreprise a bâti un véritable empire de logiciels. Ils sont capables de faire tourner une entreprise de A à Z, allant de la gestion des finances au suivi des ressources humaines et jusqu’à la relation client. Par exemple, PeopleSoft a apporté son expertise dans la gestion des ressources humaines, Siebel dans la relation client, Sun Microsystems a offert Java, le langage utilisé par des millions de développeurs, et plus récemment Cerner a ouvert les portes du monde de la santé, avec la gestion numérique des dossiers médicaux.

Chaque pièce ajoutée a permis à Oracle d’élargir son univers, passant d’un simple fournisseur de bases de données à un acteur incontournable de la transformation numérique des entreprises.

Les revenus de 14,9 milliards de dollars du 1er trimestre sont en hausse de 12% sur un an. Les investisseurs ont plutôt été impressionnés par le niveau du carnet de commandes. Ce dernier est en hausse de 359% à 455 milliards de dollars. La société a signé quatre contrats de plusieurs milliards de dollars et les revenus des bases de données pour Amazon, Google et Microsoft sont en croissance de 1529%. L’entreprise s’attend à une croissance de 77% cette année dans les infrastructures pour le cloud à 18 milliards de dollars et prévoit 144 milliards en 2030. Oracle AI Database sera le service cloud en architecture ouverte au grand modèle de langage (Mistral AI, ChatGPT, Deepseek), faisant d’Oracle une société d’hyper-croissance. 

254 milliards de dollars. La hausse de la capitalisation boursière d’Oracle le 10 septembre, nouveau record historique.

103 milliards de dollars. Le gain boursier de Larry Ellison, actionnaire principal d’Oracle le 10 septembre.

359 %. La progression sur un an du carnet de commandes d’Oracle.

La dette souveraine n’est plus un havre de paix : décryptage d’un bouleversement

Le rendement à 30 ans du Royaume-Uni a atteint 5,75%, le 3 septembre, soit un plus haut depuis 1998. Celui de la France était, le même jour, à 4,52% : un record depuis 2011. Outre-Atlantique, la dette à 30 ans a plusieurs fois franchi cette année le seuil psychologique des 5%. Du jamais vu depuis le début de la grande crise financière de 2008.

Tout se passe comme si les créanciers réclamaient soudainement une prime de risque supplémentaire sur ces actifs financiers à long terme. Actifs qui étaient considérés dans le passé, parmi les moins risqués de leur catégorie. 

Pourquoi une telle désaffection ? Ce mouvement est-il voué à durer ?

Cette tension est surprenante à un moment où les banques centrales sont en phase d’assouplissement monétaire. Ainsi, la BCE a baissé ses taux directeurs de 2% depuis juin 2024. Et elle reste ouverte à faire davantage selon les données économiques. La Fed, a réduit le loyer de l’argent de 1% entre septembre et décembre 2024. Elle a clairement laissé entendre, au symposium de Jackson Hole du 22 août, qu’elle reprendrait de nouvelles baisses dès le 17 septembre. La Banque d’Angleterre, vient de fixer les siens à 4%, le 7 août, soit une cinquième réduction depuis juin 2024.

Par définition, ces institutions décident et contrôlent le niveau des taux sur le marché monétaire à court terme. C’est-à-dire d’une maturité d’un jour à moins d’un an. Historiquement, dans ces périodes d’assouplissement, ces décisions avaient un impact plus important sur toute la courbe des taux obligataires jusqu’à 10 ans. Voire au-delà sur 30 ans. Ce n’est plus le cas visiblement aujourd’hui, car l’impact se fait uniquement ressentir sur des maturités jusqu’à 5 ans. Ainsi le rendement des emprunts de l’État fédéral américain de 2 ans et de 5 ans se négocie actuellement autour de 3,59% et de 3,64%. Contre des taux directeurs de la Fed à 4,50%. 

Celle-ci est traditionnellement mesurée avec deux indicateurs de référence. Le premier est constitué de l’écart des rendements entre le 10 ans et le 2 ans. Le second est constitué de l’écart entre les rendements de 30 ans et de 5 ans. Au Royaume-Uni, ces deux données se situaient, le 2 septembre à 82 et à 152 points de base (0,82% et 1,52%). Soit au plus haut depuis 2018 et 2017. Tandis qu’aux États-Unis, ces écarts connurent un pic le même jour à 62 et à 122 points de base (0,62% et 1,22%), soit au plus haut depuis 2022 et 2021.   

Résilience économique, endettement excessif, peur de l’inflation et réduction des bilans de banques centrales expliquent cette hausse des taux longs.

Ces niveaux de pentification ne sont pas inédits et sont historiquement le reflet d’une anticipation d’amélioration ou accélération de la croissance économique. Certes, l’économie mondiale a montré clairement au cours de ces derniers trimestres des signaux de résilience. Cependant, une forte accélération de celle-ci est loin d’être acquise, surtout quand l’emploi américain s’essouffle. Au même moment, les banques centrales réduisent la taille de leurs bilans.

Ainsi, celui de la Fed est passé d’un pic de 8 965 milliards de dollars en avril 2022 à 6 600 milliards aujourd’hui. Il en est de même à la BCE pour des montants assez similaire en euros. 

Le coupable est plutôt à chercher du côté de l’endettement excessif des États et de la peur de l’inflation. 

Aujourd’hui, rares sont les pays ayant un ratio de dette sur PIB inférieur à 100%. La Suisse, l’Australie et l’Allemagne, étant respectivement à 38%, à 44% et à 63% font figure d’exceptions. La trajectoire à terme de certains acteurs fait peur : plus de 20 points pour les États-Unis d’ici 2035, sans tenir compte de la dernière loi fiscale censée rajouter 4 100 milliards de dettes, selon les estimations du CBO (Congressional Budget Office).

En Angleterre, un rapport de septembre 2024 du « Office for Budget Responsability » évoque plus qu’un doublement de la dette sur PIB d’ici 50 ans, dans le cas d’un scénario noir, lié au changement climatique et au vieillissement de la population.  

Pour s’en sortir, l’arme de l’inflation s’avère redoutable. Les revenus et les prix augmentent, mais la dette contractée reste fixe en valeur nominale. Dans le cas où les prix et les salaires doublent, une dette de 100 conserve toujours la même valeur faciale. Mais son poids relatif diminue de moitié en proportion du PIB réel. Ainsi, la dette pèse relativement moins lourd dans l’économie. L’histoire a démontré que ce n’est pas par l’austérité, mais par l’inflation que les Nations parviennent à alléger leur fardeau.

Par exemple après la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis ont vu leur ratio dette sur PIB passer de 119 % en 1946 à 92 % en 1948, en grande partie grâce à une inflation soutenue. La baisse des taux courts fera baisser également la charge d’intérêts. Actuellement, plus de 20% de l’encours de la dette américaine a une maturité inférieure à 12 mois.

3 578 $. Le cours de l’once d’or en séance le 4 septembre, nouveau record historique.

5,75 %. Le rendement des obligations souveraines à 30 ans du Royaume-Uni, au plus haut depuis 1998.

4,52 %. Le rendement des obligations souveraines à 30 ans de la France, au plus haut depuis 2011.

Fin de l’hypercroissance de Nvidia ?

La publication de Nvidia reste la plus attendue parmi celles des « Sept Magnifiques ». La société a annoncé, au deuxième trimestre, des revenus et un bénéfice net (selon les normes comptables US GAAP) en progression. Ces derniers augmentent respectivement de 56 % et de 59 %. Légèrement au-dessus des attentes. En plus de sa croissance remarquable, l’entreprise reste une formidable machine à cash. Avec une marge nette de plus de 56 % et un free cash-flow opérationnel de 15,4 milliards de dollars (soit un tiers des ventes).

Même solides, ces données ne suffisent plus à satisfaire les investisseurs les plus exigeants. Ceux-là même qui misent sur une très forte performance du titre dans les séances suivant la publication des résultats. Toutefois, arrêtons de simplement comparer les chiffres avec le consensus, pour expliquer la réaction à court terme du cours de l’action. Menons une analyse beaucoup plus approfondie, afin de répondre à cette question plus existentielle : assistons-nous à la fin de la surperformance de Nvidia en Bourse ?

Les résultats du segment centre de données (Data Center) ont légèrement déçu. La partie calcul régresse de 1 % d’un trimestre sur l’autre, en raison d’une chute des ventes de puces H20. De l’autre côté la partie réseaux progresse vivement de 46 %, portée par l’essor de NVLink et d’InfiniBand.

Deux à cinq milliards de dollars de chiffre d’affaires signés en Chine sur les fameuses puces H20, spécialement conçues pour ce pays, étaient toujours en attente de réalisation. Après une restriction totale sur ces composants jugés stratégiques, le gouvernement américain a mis en place un système de licences. Ceci, afin de mieux cibler et contrôler les clients finaux. En contrepartie, un taux de prélèvement de 15 % en faveur des États-Unis devrait être instauré. Dans ses prévisions de 54 milliards de dollars de revenus pour le troisième trimestre, la directrice financière Colette Kress a précisé qu’aucune vente en Chine n’était incluse. Le marché chinois, d’un potentiel estimé de 50 milliards de dollars, est donc capable, à lui seul, de redynamiser la croissance et les profits du groupe.

Certains analystes redoutent l’émergence d’une concurrence accrue. Ainsi, Broadcom prévoit un potentiel de croissance de plus de 50 % en 2026 dans ces puces de type ASIC dédiées à l’intelligence artificielle. En effet, elles sont réputées plus abordables et moins consommatrices d’énergie. Cette menace est-elle capable de remettre en cause la suprématie de Nvidia ?

L’entreprise a répondu à cette problématique au cours de la conférence de presse. Elle a comparé les caractéristiques des circuits intégrés à application spécifique — Application-Specific Integrated Circuit (ASIC) — et les produits de Nvidia, utilisant davantage de GPU — Graphics Processing Unit. L’intelligence artificielle est considérée comme de l’informatique accélérée. Bien plus complexe que l’informatique standard.

Plusieurs industries utilisent des circuits intégrés standardisés pour des tâches répétitives, notamment dans la téléphonie mobile et l’automobile. L’IA générative est beaucoup plus complexe et nécessite bien plus que la simple conception de logiciels intégrés dans des transistors. Seule une partie des fonctions liées à l’IA pourra être standardisée. Le reste sera pris en charge par des processeurs complexes et puissants comme ceux de Nvidia.

Voilà pourquoi l’entreprise reste confiante face aux besoins divers en solutions innovantes, qui sont en réalité complémentaires.

Pour mieux comprendre la révolution technologique en cours et son évolution, fions-nous au dirigeant de Nvidia. Jensen Huang est un Américano-Taïwanais immigré aux États-Unis en 1973, qui a fondé sa société avec un investissement personnel de 200 dollars, identique à celui des deux autres cofondateurs. En 32 ans, Nvidia est devenue la première capitalisation mondiale, avec plus de 4 378 milliards de dollars. Soit une fortune de 156 milliards de dollars pour Jensen Huang.

Ses propos sont rassurants, avec un potentiel de 3 000 à 4 000 milliards de dollars en dépenses d’infrastructure en IA d’ici la fin de la décennie. De plus, de nouvelles applications surgissent. Par exemple le cerveau de Robot Jetson Thor, pour embarquer de l’IA dans les robots humanoïdes. En ce qui concerne la gamme produit, la nouvelle plateforme Blackwell est en phase d’accélération de production. La société dispose déjà de la génération suivante, baptisée Rubin. Elle est dotée d’une performance informatique équivalente à 100 pétaflops (unité de mesure de 10¹⁵ opérations en virgule flottante par seconde). Ceci représente cinq fois plus que la capacité maximale à terme prévue de Blackwell. Tous ces éléments nous confortent dans la faculté de Nvidia de dépasser le seuil des 200 milliards de dollars de revenus au cours de cet exercice. Et d’atteindre le cap des 300 milliards ces prochaines années.

49.1. L’article de la Constitution permettant au Premier ministre d’engager la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale.

50 %. Le taux des droits de douane imposé à l’Inde.

3 000 à 4 000 milliards de dollars. Les dépenses en infrastructures pour l’IA d’ici 2030, selon Nvidia.

Des sommets pour des marchés au sommet

L’espoir fait vivre. Ce proverbe ancien, dont l’origine remonterait au XVème siècle, explique en grande partie la psychologie et la résilience actuelles des marchés. C’est presque une tradition : les investisseurs anticipent historiquement les reprises économiques avec 5 à 6 mois d’avance. Ils se positionnent précocement sur les entreprises susceptibles de bénéficier du prochain rebond d’activité.

Nous observons actuellement ce phénomène en Europe. Selon les données issues des résultats du deuxième trimestre, avec une décroissance de 0,9% sur un an des revenus des entreprises, et une progression — dividendes réinvestis — de plus de 12% de l’indice Stoxx Europe 600.

En effet, malgré une activité pénalisée par une croissance du PIB atone et une baisse du dollar, les grandes capitalisations boursières ont su s’adapter à cet environnement incertain. Tout en préservant leurs marges. Cela permet d’afficher une croissance globale de 5% des bénéfices par action sur un an. L’écart de performance de  7% s’explique par une expansion des multiples de valorisation. C’est le reflet de l’espoir d’un monde meilleur, et d’un excès de pessimisme antérieur sur le Vieux Continent. 

Celles-ci sont multiples. Tout d’abord, l’annonce par le nouveau chancelier allemand d’un plan de relance massif de plus de 500 milliards d’euros, le 5 mars dernier. Il devrait se concrétiser et avoir un impact positif sur le PIB outre-Rhin, de l’ordre de 1 % par an au cours des prochaines années. Ensuite, le réarmement progressif des pays confrontés à la menace russe dope une partie de l’économie. Et explique la forte performance des valeurs du secteur.

De surcroît, la loi de finances promulguée symboliquement par Donald Trump le 4 juillet — jour férié célébrant l’indépendance américaine — creusera le déficit fédéral de plus de 3 000 milliards de dollars au cours des dix prochaines années, selon le Congressional Budget Office. Elle devrait améliorer la croissance outre-Atlantique en 2026 et en 2027, même si les économistes sont partagés sur son ampleur, qui varie de 0,2% chez les plus pessimistes à 0,7% chez les plus optimistes. Au global, nous sommes bien dans une ère de relance dite keynésienne dans les principales zones économiques de la planète (États-Unis, Europe et Chine). Ceci milite pour une amélioration de l’économie mondiale et écarte drastiquement le scénario d’une récession généralisée.

Les politiciens sont actuellement très actifs sur la scène internationale. Tout d’abord, les différentes réunions entre les protagonistes laissent entrevoir un semblant de paix en Ukraine. Même si l’on peut douter de sa durabilité, ses effets sur la population civile ne peuvent qu’être positifs, tant sur place que pour l’ensemble du continent européen.

Ensuite, les pourparlers entre Européens et Américains sur les échanges commerciaux ont abouti à une poignée de main, le 27 juillet, entre Ursula von der Leyen et Donald Trump. Ainsi qu’à un accord sur les droits de douane.

Les premières annonces ont été complétées le 21 août, par un communiqué commun révélant un accord-cadre entre les deux zones. Même si l’Union européenne est clairement perdante avec un nouveau taux général de 15% (avec de nombreuses exemptions) sur ses exportations vers le Nouveau Monde — contre quelques pourcents précédemment — les règles sont désormais connues. La peur de l’inconnu, si redoutée par les entrepreneurs et les investisseurs, a disparu. Cela ouvre la voie à une reprise du commerce à moyen terme.

Les indices PMI, considérés comme des indicateurs avancés, sont historiquement annonciateurs d’un rebond de l’activité.  Or ceux-ci ont clairement donnés des signaux positifs en août, selon les données préliminaires publiées le 21 août. Le phénomène de rebond anticipé des marchés, précédant celui de l’économie, serait une nouvelle fois validé. Ainsi, les nouvelles commandes ont progressé pour la première fois depuis juin 2024. De son côté l’indice flash de production manufacturière dans la zone euro a affiché un plus haut de 41 mois à 52,3.

C’est le choix cornélien que devra faire la Fed au cours de ses prochaines réunions, dont la prochaine est prévue le 17 septembre. Aujourd’hui, son président Jerome Powell fera un discours très attendu au cours du Symposium de Jackson Hole, dans le Wyoming. Le moindre mot sera décrypté, afin de deviner l’évolution de la politique monétaire. Les investisseurs anticipent déjà une future baisse et peuvent être déçus. Tout dépendra si leurs espoirs sont retardés de quelques semaines, ce qui n’altèrerait fondamentalement pas le scénario actuel de reprise. 

90 milliards. Le montant en euros des achats de l’Ukraine en armements américains.

52,3. L’indice PMI flash de la  production manufacturière en août dans la zone euro, soit un plus haut de 41 mois.

55,2. L’indice PMI flash de la production manufacturière en août aux USA, soit un plus haut de 39 mois.